L'emploi des jeunes est en rade, et celui des seniors dans la panade. Mais on peut s'en tirer, sortir de cette spirale grâce à une politique de l'emploi aussi énergique que cohérente. Comment ? De quoi ? Avec des contrats aidés ? Des exonérations de charges pour les employeurs ? Une relance de l'économie ? Une ré-industrialisation forcenée ?
Non, pas besoin de ces mesures qui coûtent une blinde et dont on n'est même pas sûr. Jeannette Bougrab a un truc infaillible : le passage du CV au-dessus de la pile. Un sport que la nouvelle secrétaire d'Etat à la Jeunesse semblait bien maîtriser au micro de Fun Radio mardi dernier*. Et dont elle a fait bénéficier les jeunes qui avaient pris la peine de l'appeler au cours de la Libre antenne à laquelle elle participait ce soir-là.
C'est sympa de filer un coup de main à Mathieu, un auditeur de 22 ans en BTS communication. C'est tout aussi chouette d'aider Nabil, qui rame, malgré son BTS Banque. La ministre sympa a promis de s'emparer de leur CV pour leur dégotter un job.
« En tant que ministre des Jeunes, ce que je fais quand je suis en déplacement, j'essaie de prendre deux ou trois CV, et je donne un coup de main. [...] Si ce soir, je me dis que j'ai réussi à vous trouver un job, je pourrais me regarder dans un miroir. »*
C'est cool. Mais c'est une manière d'ériger le piston en politique nationale de l'emploi. Oh le vilain gros mot. On ne dit pas « piston », on lui préfère le terme plus châtié de « cooptation », ou mieux de « réseautage ». Mais il y a entre ces trois manières d'agir autant de différences qu'entre un salarié susceptible d'être licencié et une variable d'ajustement.
Le problème de ce fameux réseautage, c'est qu'il est aujourd'hui totalement encouragé par les organismes censés plancher sur l'emploi de masse. Car l'Apec comme Pôle emploi conseille à ses usagers d'en user largement. De l'entretenir s'il existe, et de le créer si l'on est isolé. Ou même si l'on est un chômeur perdu dans la pampa, de tweeter, de poker, de linkediniser, ou de Viadeoiser.
Ainsi donc, si on n'a pas d'« amis », on a des soucis. Et peu de chance de décrocher un job. Les diplômes ? L'expérience ? Les compétences ? Des atouts intéressants, certes. Mais si l'on n'a pas l'indispensable réseau pour les exploiter, ils ne serviraient pas à grand chose. Il faut connaître l'homme qui a vu l'homme qui connaît le recruteur. Il faut balancer des remarques spirituelles sur twitter, il faut posséder le carnet d'adresses d'un pro des relations publiques, sinon, c'est le chômage longue durée assuré.
Évidemment, on n'est pas benêt. On sait bien que les réseaux d'influence valent toutes les compétences. Sauf que, lorsque ce système de recherche d'emploi est érigé en outil officiel, c'est avant tout une manière pour les pouvoirs publics d'avouer leur défaite pour aider les chercheurs d'emploi. Une manière, pour Pôle emploi ou l'Apec d'expliquer qu'ils ne sont pas (ou plus) le premier des réseaux.
Sylvia Di Pasquale, rédactrice en chef de Cadremploi © Cadremploi.fr - 21 février 2011
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Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.