Etre ou ne pas être une boîte "cool"

Sylvia Di Pasquale

Plaire aux uns, ne pas froisser les autres. Apparaître comme la boîte la plus « cool » du globe pour attirer les meilleurs candidats. Se présenter comme une maison sérieuse pour attirer les meilleurs investisseurs. Ce grand écart, nombre d’entreprises le tentent ou le subissent. Un écartèlement des valeurs qui peut faire mal aux articulations. Celles de Mathieu et celles de Mark s’en sortent plutôt bien.

Mathieu, n’est pas une star. Mark si. Mathieu est un candidat au profil de commercial que j'ai croisé cette semaine dans un TGV. Costume, cravate, le sourire avenant, il avait envie de discuter. Mark porte le sweat à capuche le plus célèbre du monde et dirige Facebook.

Mathieu est en partance pour un entretien d’embauche à Paris. Mark a donné une interview à The Atlantic . Ce dernier, répondant à une question concernant la coolitude de Facebook, a surpris son monde. Pour lui, son entreprise n’est pas cool : « ça n’a jamais été mon but. Je suis la personne la moins cool du monde ». Évidemment ce virage à 90° du boss du réseau est un message destiné aux investisseurs et aux politiques, une aubade pour les cajoler. En dézinguant au passage l’image trop sympa de l’entreprise trop bien où il est trop top de jouer au baby-foot. En prenant le risque de ne plus attirer les meilleurs geeks de la planète ? Il en faudrait beaucoup plus pour les détourner de Palo Alto. La légende est plus qu’en marche : elle est devenue réalité pour des millions d’informaticiens qui sont persuadés de son bien-fondé. Alors Mark et sa capuche peuvent bien raconter ce qu’ils veulent à un site américain.

Mathieu, lui, a l’embarras du choix. Dans l’entretien qu’il s’apprête à passer, ce sera lui le boss. Pas le consultant du cabinet qui l'a convoqué. Et c’est le candidat qui décidera de dire oui, ou pas. Parmi les critères qui vont le pousser à signer, ou non, la rémunération entre en ligne de compte, évidemment. Mais pas seulement. Un autre élément est déterminant pour lui : la coolitude de l’entreprise. "Qu'elle m’encourage, qu'elle me fasse confiance plutôt que de me fliquer."

Mathieu peut se permettre de faire son difficile : il est commercial. Une fonction où les offres s’accumulent, comme la pénurie de candidats. Mathieu a 3 ans d'expérience, un relationnel hors pair et des preuves de performances dans sa besace. C'est pour cela que le consultant a voulu le voir très vite.

Mark peut lui aussi se permettre de faire son difficile. Les candidats se bousculent, sans qu’il ait à craindre la pénurie de cerveaux. Même s’il est de moins en moins cool. Et même s’il ne l’a jamais été, comme il le prétend. Etre ou ne pas être cool, pour une entreprise, est un luxe réservé à quelques enseignes seulement. Choisir son entreprise parce qu’elle est cool est un luxe réservé à quelques candidats seulement. La coolitude est un sport de riches.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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