Ce n’est pas l’article le plus spectaculaire de la loi Macron. Au hit-parade des mesures adoptées au forceps par la magie du 49-3, les ouvertures du dimanche et les autocars de ligne ont damé le pion à cet article 101*. Pourtant, il est certainement aussi important, et peut être plus, que le nombre de journées dominicales ouvrées et les voyages en car. En deux mots, il révise la manière, pour les entreprises, de mener leurs plans sociaux. Et touche nombre de salariés d’entreprises en difficulté.

C’est que, jusqu’à présent, pour fermer une filiale, et procéder à des licenciements collectifs, il fallait que le groupe à laquelle elle était adossée, soit lui-même en mauvaise posture. Si tel n’était pas le cas, le groupe devait veiller à proposer le reclassement des salariés virés ou à les reconvertir. Avec la nouvelle loi, c’est terminé. La filiale d’une grande boîte, même florissante, pourra faire un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi), toute seule dans son coin, si elle, et elle seule, est dans une mauvaise passe. Une mesure qui risque évidemment de donner des idées quelque peu retorses à certains employeurs créatifs.
Un département est moribond ? Suffit de le filialiser avant de le liquider. Une nouvelle stratégie que les salariés, notamment les cadres devront désormais avoir à l’esprit dans leur plan de carrière. Car ils devront mener leur petite enquête avant d’accepter cette promotion qui, sur le papier, semble parfaitement coller à leurs ambitions. Peser le pour, le contre et son contraire avant de filer vers cette filiale qui nous tend les bras. Au risque de s’y perdre et de perdre son job.
Mais contre toute attente, cette disposition voulue par le jeune premier de Bercy pourrait aussi, par effet pervers, donner des idées aux cadres qui s’ennuient. Ceux qui rêvent d’ailleurs mais n’osent pas donner leur démission, par peur du vide financier ou du manque d’herbe plus verte ailleurs. Grâce à l’article 101, demander un poste dans une filiale condamnée, leur garantirait une sortie indemnisée. Pas vraiment les effets recherchés par un projet de loi officiellement destinée à soutenir la « croissance, l’égalité des chances et l’activité économique ».
@Syl_DiPasquale © Cadremploi
Dessin de Charles Monnier ©Cadremploi
*Licenciement économique dans le cadre d’un PSE : article 101 du projet de loi Macron Le II de l’article L. 1233-58 du code du travail est ainsi modifié : 1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Par dérogation au 1° de l’article L. 1233-57-3, sans préjudice de la recherche, selon le cas, par l’administrateur, le liquidateur ou l’employeur, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, des moyens du groupe auquel l’employeur appartient pour l’établissement du plan de sauvegarde de l’emploi, l’autorité administrative homologue le plan de sauvegarde de l’emploi après s’être assurée du respect par celui-ci des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 au regard des moyens dont dispose l’entreprise. » ; |
Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.