Finalement, le burn-out n’est pas une maladie professionnelle

Sylvia Di Pasquale

Finalement, le burn-out n’est pas une maladie professionnelle

Ce n’est pas une valse-hésitation, mais un pogo endiablé. Les gesticulations, allers-retours et triples axels auxquels s’est livré l’OMS il y a quelques jours concernant la classification du burn-out en tant que maladie professionnelle est symptomatique de la difficulté de ranger ce phénomène dans de petites cases médicales.

Rappel des pas de danse : le 25 mai dernier, l’Organisation mondiale de la santé se décide. Oui, le burn-out est une maladie professionnelle et sera officiellement classée comme telle le 1ᵉʳ janvier 2022. Voilà donc une maladie reconnue dans le monde entier, mais pas en France. Mais pourquoi ? Mais comment ? Le lobbying du patronat est-il à l’œuvre ? Muriel Pénicaud, ministre du Travail, souhaite-t-elle que les Français s’épuisent au boulot ? La meute réseausociétale hurle au scandale, sauf que le tollé n’a même pas le temps de se soulever que l’OMS rétropédale

Le burn-out est un phénomène lié au travail, mais pas une maladie

Son nouveau verdict tombe le mardi suivant : en fait non, le burn-out ne sera pas une maladie professionnelle en 2022. Pour l’Organisation, c’est un phénomène lié au travail, mais pas une maladie. Et la nuance n’est pas anodine. Sauf à considérer que la ministre du Travail, le Medef et la CPME ont un tel pouvoir qu’ils puissent infléchir l’OMS, cette volte-face témoigne surtout de la difficulté à cerner le burn-out, et de le circonscrire à la seule sphère professionnelle. 

Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup. D’ailleurs, selon cet expert interrogé par France Culture, « il y a 134 manifestations cliniques différentes qui permettent de diagnostiquer un burn-out. Aucune maladie au monde n’en comporte autant. » Alors, l’Organisation mondiale de la santé préfère parler de « phénomène lié au travail ». Un « phénomène », pas une « maladie ». 

 

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Évidemment, on peut coller cette prudence de sioux sur le dos des enjeux économiques considérables que pourrait avoir une prise en charge totale par la Sécu ou les entreprises, selon les cas et selon les pays. Mais on peut aussi y voir la complexité de l’affaire. 

 

Une maladie professionnelle a des symptômes clairs, uniquement liés à l’univers du travail. Un contact avec l’amiante, le nucléaire, le grisou ou toute autre saloperie générée par un usage professionnel. Mais le burn-out ? Le trop-plein de boulot est forcément une notion à dimension variable, selon les métiers et selon les individus. Les conséquences du surmenage professionnel peuvent avoir des effets liés à d’autres facteurs que le seul boulot. Ils peuvent être induits par une trop forte charge mentale personnelle qui s’y surajoutent. 

Alors on fait quoi ? Pas question de lâcher l’affaire, pas question de traiter ce « phénomène » qui tue, comme un simple aléa, une fatalité. Mais de continuer à définir précisément les contours d’un fléau. Car un texte qui fait loi, internationale ou hexagonale, ne saurait être rédigé sans réflexion, sous le seul coup d’une émotion.

 

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Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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