Le jour où je découvre que mon job est le pire job du monde

Il faudrait toujours écouter ses parents. Ils me destinaient à un avenir rassurant, nimbé de statistiques et de probabilités dans une belle compagnie d’assurances. Moi ? Je voulais faire journaliste. Et voilà que quelques années plus tard, le site américain Careercast.com donne raison à mes géniteurs. Le meilleur métier que l'on puisse exercer ? Celui d’actuaire. Le pire ? Journaliste, évidemment.

Les critères retenus pour ce classement sont de ceux qui tranquillisent : la rémunération maximum, les perspectives d’embauche au top, l’environnement de travail trop chou et le stress minimum. Alors forcément, les plumitifs, comme les acteurs, les bûcherons ou les éleveurs de vaches laitières sont tout au fond de la grille. A l’inverse, les boulots d’ingénieurs en biomédical et en informatique, ceux de conseillers financiers, les professions de dentiste ou d’ophtalmo figurent parmi les meilleurs jobs.

Le plus piquant dans ce classement, qui après tout n’a pas plus de valeur que n’importe quel autre sondage, c’est qu’il nous vient de la grande Amérique. Celle des pionniers, des aventuriers et des tycoons. Du pays où la prise de risque est glorifiée. La crise aura donc eu la peau de la légende de l’Oncle Sam qui peut réussir en partant de peu, qui peut s’élever à la force de son seul bon vouloir. À condition de s’affranchir des critères du « good job » version Careercast.

On le sait bien, dans notre vieux pays, la fonction publique est prisée, car elle offre justement cette tranquillité de l’emploi à vie et du stress mini (quoique). Mais on découvre peut être aujourd’hui une nouvelle Amérique, celle qui s’inspire de la vieille Europe après lui avoir insufflé ses bonnes et mauvaises pratiques pendant des décennies. Une Amérique qui découvre la fonctionnarisation des esprits.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr – 6 mai 2013

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr