Le meilleur job cache-misère

Sylvia Di Pasquale

Un marronnier, comme ces arbres qui fleurissent chaque automne, c’est une info récurrente, un bout de scotch qui colle aux basques des médias qui n’arrivent pas à s’en débarrasser. Ainsi, ces temps-ci, on a droit aux affres du bac, avant de se gaver des chassés-croisés des juilletistes embouchonnés.

L’une de ces infos toujours sur le retour est consacrée aux meilleurs jobs du monde. Depuis quatre ans, la bonne grosse opération de com de l’Office de tourisme australien est devenue une référence. Suffit de tapoter « meilleur job du monde » sur un moteur de recherche pour voir débouler plus d’un million d’occurrences sur la question. Une question pour une communication qui en pose une autre. Pourquoi tant d’intérêt pour ce qui est évidemment plus un jeu qu’un job ? Car l’une des gagnantes de l’année, une Française en l’occurrence, va surtout se balader dans le Queensland en étant payée. Les tâches qu’elle devra accomplir (explorer la barrière de corail et les parcs nationaux) sont top, et on lui souhaite tout le bonheur du monde.

Mais ne soyons pas dupe du but : permettre à ce continent du bout du monde de s’offrir une bonne grosse campagne à peu de frais à travers le monde. En surfant (ce qui pour un organisme australien est on ne peut plus logique) sur le la montée du chômage. Car la première campagne du « Best job in the world » remonte précisément à 2009, l’année même où la crise a réellement commencé à frapper les pays occidentaux. Alors quand les inscriptions à Pôle emploi explosent, il est bon de rêver à des boulots fictifs inatteignables, surtout quand on a du mal à atteindre des boulots pour de vrai et en d’autres temps atteignables.

Du coup, le coup de génie australien a fait des petits. Et l’on a vu fleurir de-ci de-là, tels des marrons, d’autres meilleurs jobs du monde. Comme le dernier en date, organisé par une marque de sous-vêtements, et qui permet à la gagnante de tester des maillots de bain pendant trois semaines à Hawaï, en étant rémunérée, évidemment.

On peut marcher dans la combine, en sourire, se dire que ça ne fait de mal à personne et surtout pas aux vainqueurs de ces concours. On peut aussi se demander si le fait de profiter de la récession pour vendre de la lingerie ou des vacances aux antipodes n’est pas un tantinet limite. Mais on passerait pour un rabat-joie.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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