Les managers français atteints de contrôlite aigüe ?

Sylvia Di Pasquale

Parmi les petites phrases de la rentrée, celle de Patrick Pélata a fait l’effet d’une flèche de curare. « La surenchère dans le contrôle est ancrée dans la culture managériale française et elle coûte cher », a déclaré l’ex-numéro 2 de Renault-Nissan dans une interview donnée au magazine Liaisons Sociales*. Et pan sur les méchants cadres qui ne pensent qu’à fliquer leurs ouailles.

Et Pélata d’illustrer ses propos : « Chez Renault, nous avions calculé que les managers passaient, dans l’ingénierie, 40 % de leur temps à contrôler les coûts directs, les délais, la qualité de la conception…, soit huit à dix fois plus que leurs homologues de Nissan ! Et lorsque j’ai voulu supprimer les « reprévisions détaillées » que toute l’entreprise faisait tous les trois ou quatre mois sur les revenus et les coûts, je me suis rendu compte que les managers continuaient de les faire… clandestinement. »

Evidemment, l’interview prend un certain relief quand on sait que l’homme qui parle a perdu son job, après avoir endossé la responsabilité de la très grosse erreur qui a amené la direction du Losange à virer trois cadres soupçonnés d’espionnage industriel sur la base d’un dossier totalement vide. Aujourd’hui Patrice Pélata s’en est allé vers d’autres cieux industriels et les cadres de Renault, tels des Dreyfus de l’automobile, sont lavés de tous soupçons.

Mais si, au-delà de ce mauvais polar, l’ex-n°2 avait raison ? Et si la contrôlite et le flicage étaient devenus les deux boulets du management à la française ? Et si les process de validation, de vérification, de triple approbation de toute action, de tout projet et de la moindre réalisation, dans l’industrie mais aussi dans les services, n’étaient qu’un frein énorme à l’innovation, à la réactivité d’une entreprise et à la motivation de ses salariés puisque ces derniers ne peuvent pas travailler en toute confiance ?

* Interview menée par Anne Fairise et Sandrine Foulon - Liaisons Sociales Magazine – N° 134, septembre 2012.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi – 3 septembre 2012

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Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

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Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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