
Dans le métro parisien, il est d’usage de voir débouler un pauvre hère qui vient quémander un euro, un ticket resto ou un boulot. Alors Michel et Augustin, les sales gosses du petit gâteau, ont décidé de chambouler cette triste habitude et de faire l’inverse : proposer des jobs dans les voitures de la RATP. Ou plutôt d’envoyer Anne-Claire le faire. Et la voilà qui déboule dans une rame bien pleine à la station Trocadéro avec un tablier rouge autour du cou. « Bonjour, je m’appelle Anne-Claire, je suis responsable des ressources humaines chez Michel et Augustin. Alors ça, c’est déjà pas évident. Et je n’arrive pas à recruter Mesdames et Messieurs. » Évidemment, les passagers l’écoutent lorsqu’elle explique qu’elle cherche des gens qui ont le "power", car elle recrute un web designer, un responsable des achats, des commerciaux et même des stagiaires.
Anne-Claire ne s’appelle peut-être pas Anne-Claire et n’est peut-être pas DRH mais comédienne. Peu importe. Elle enthousiasme tous les usagers de sa rame ce jour-là et finit par se faire applaudir comme on peut le voir sur cette vidéo puisque la scène a bien évidemment été filmée. Et postée fort opportunément pile le lendemain de la publication des chiffres chocs de Pôle emploi : 1,73 million d’emplois sont à pourvoir en 2015 et 32,4 % des entreprises pensent rencontrer des difficultés à recruter.
Du coup, les duettistes du cookie auront fait beaucoup plus que de ramasser quelques CV. Ils auront convaincu une rame de métro entière, et des brassées d’internautes à travers les réseaux sociaux – plus de 180 000 vues via Facebook, des centaines de partages sur Twitter en quelques heures –, que Michel et Augustin est la boîte la plus cool du monde. Ce qui n’est peut-être pas vrai, pas plus qu’Anne-Claire ne s’appelle Anne-Claire.
Mais peu importe. Car l’effet d’une telle opération est à plusieurs lames. La première permet de démultiplier l’impact d’une offre d’emploi. Après la réalité augmentée, l’annonce augmentée passe par le métro, la rue, où même les airs, pourvu qu’elle atteigne son but : que le candidat potentiel sache que telle boîte est à la recherche de tel profil. Le vôtre si ça se trouve. Mais le coup de Michel et Augustin permet en plus au pâtissier industriel aujourd’hui en pleine expansion de s’offrir une image d’employeur aux petits oignons.
Une image d’entreprise fun et sympa, avec le danger que constitue un tel atout : celui d’attirer des candidats qui n’auraient pas compris que la réalité du boulot au quotidien chez Michel et Augustin, est aussi très cadrée, comme ses co-fondateurs l’expliquaient dans cette interview sur Cadremploi. Et le rappelaient ici 2 ans plus tard « Il y a toujours à gérer le décalage entre l’image pittoresque et la réalité de l’entreprise derrière. C’est pourquoi je précise bien que si l’ambiance est très sympathique, il y a un gros niveau d’exigence. […] Michel et Augustin, ce n’est pas non plus le monde merveilleux de Mickey. » Car des salariés revenus déçus du Pays de cocagne n’en sont que plus hargneux.
Dessin de Charles Monnier
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Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.