Pôle emploi perd son médiateur avec fracas

Sylvia Di Pasquale

C'était il y a un tout petit mois.

À l'époque, on vous racontait benoîtement les aventures de Benoît. Nous vous expliquions ici que le premier rapport du médiateur de Pôle emploi n'était pas si dramatique que ça. Que, selon les services de communication du grand machin qui s'occupe des chômeurs, le document de Benoît Genuini contenait même quelques bonnes surprises et que tout n'était pas si sombre dans le long hiver du Pôle.


En fait, comme tous les médias, nous n'avions eu à nous mettre sous la dent qu'un petit extrait du rapport qui, en substance, expliquait que les chômeurs ne sont que 5 % à râler pour avoir été radiés. Et youkaïdi, Pôle emploi n'est pas le super radieur que l'on croit. Et youplaboum, sa direction est super d'accord avec son médiateur. Et nous, on est super tombé dans le panneau.

Car pas plus tard que la semaine dernière, le médiateur a démissionné avec fracas en pointant le manque de soutien et, surtout, le peu d'attention portée à son rapport par sa direction. Car ce document est loin d'être aussi angélique que ce que l'on nous a laissé miroiter. Si 5 % des chômeurs seulement l'ont sollicité pour se plaindre de leur radiation, ne serait-ce pas pour la simple raison qu'il a été injoignable très longtemps ? « J'ai dû batailler huit mois avant que l'adresse du médiateur soit visible sur le site internet de Pôle emploi » a t-il expliqué à l'Express.fr. Et puis, lorsque le nombre de saisines a augmenté, l'homme a demandé des moyens pour s'en occuper. Peine perdue.

Mais le pavé dans le fossé qui l'a séparé de sa direction a évidemment été atteint lors de la remise du fameux rapport (1). Car non content de pointer les dysfonctionnements de l'usine à gaz (les dossiers perdus, les radiations par téléphone, des courriers sans humanité, etc.), il fait des propositions concrètes à la direction du Pôle. Selon lui, il faudrait permettre aux chercheurs d'emploi de cumuler un peu plus largement une activité réduite et les allocations de chômage. Il conviendrait également de mieux encadrer les conditions de radiation. Et de reconsidérer l'accueil (et l'indemnisation) des démissionnaires, lorsque leur motif est légitime.

Ce rapport, raconte Benoît Genuini a été très apprécié « par les syndicats ». Et la direction ? « Aucun retour, aucune intention, aucune impulsion ». Sûr qu'un an de travail pour caler le fauteuil bancal d'une direction générale, ça peut irriter. Le voilà donc parti.

Evidemment, on nous rétorquera qu'un médiateur n'est pas un auditeur, que celui-ci, même ancien Pdg d'Accenture France, a outrepassé ses fonctions. Mais si les dysfonctionnements sont réels, nul n'est besoin qu'ils soient pointés par une personne spécialement autorisée pour les traiter.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 19 avril 2010

Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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