Pour décrocher une bonne note, nommez des femmes !

Sylvia Di Pasquale

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Pour décrocher une bonne note, nommez des femmes !
Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Aujourd'hui, c'est le 100ᵉ anniversaire de la Journée internationale de la femme et on risque d'en entendre causer. Au bureau, à la radio, au bistrot, dans le métro et dans les journaux, on va piédestaliser les filles comme jamais. Les médias sortent le mascara et les entreprises se mettent en jupe. C'est que ces dernières se féminisent comme c'est pas permis. Pour s'en convaincre, il faut observer de près le gringue que les plus grandes d'entre elles font à leurs cadrettes en ce moment. Il faut dire que, depuis quelque temps, les top manageuses ont une marotte : elles créent des clubs, des réseaux, des comités ou des associations.

 

Chaque secteur a le sien - l'automobile, la finance, l'informatique, le consulting ...- mais la plupart font fi des ghettos et se regroupent aussi par affinité même si elles exercent des métiers différents. Ces cercles sont destinés à faire avancer la cause féminine dans l'entreprise, ce qui est on ne peut plus estimable. En revanche, ce qui paraît plus suspect, c'est l'intérêt que portent désormais les employeurs de grandes entreprises à ces clubs. Et vas-y que je te les sponsorise et que j'incite mes salariées à s'y engager. Quoi ? Ce serait une manière facile de se donner un vernis féministe ? Comment ? Ça coûte toujours moins cher que de combler les 20 % de delta salarial en défaveur des femmes ? Ne me faites pas écrire en majuscule ce que je pense en minuscule. Quoique.

 

Ces opérations de pure communication ressemblent pas mal à la vertitude qui s'est emparée des entreprises depuis trois ans. Il n'y a plus une boîte française qui ne fasse dans le développement durable. Même la dernière TPE spécialisée dans la mort aux rats se veut écolo. En surface. Le féminisme pourrait donc suivre le même chemin d'esbroufe, si l'on s'en tient au déferlement d'initiatives prises en cet unique lundi.

 

D'autant que les deux phénomènes relèvent du même calcul : celui de la notation sociale, éthique et environnementale, qui émerge en France. Cette note, délivrée par des agences spécialisées, pourrait bien prendre de l'importance dans les prochaines années. Les cancres écoperaient de taxes car elles salissent ou discriminent. Une bonne raison de s'occuper des petits oiseaux et des dames.

 

Bien sûr, toutes ces initiatives ne relèvent pas de ces bas calculs. Les instances dirigeantes ne sont plus aussi sourdes à la vertueuse féminisation des QG des entreprises. Le nier relèverait évidemment d'un fieffé cynisme. Pour se détourner de la tentation, on peut jeter un œil sur l'initiative de l'Orse (Observatoire sur la responsabilité sociétale des entreprises). De quoi s'agit-il ? D'un livre mis en vente précisément en ce jour de fête. Il s'appelle « Patrons papas : paroles de dirigeants sur l'équilibre travail et vie privéePatrons papas : paroles de dirigeants sur l'équilibre travail et vie privée ». N'y figurent que des pointures. Les stars des entreprises pointent au sommaire. Et ces messieurs de se livrer à des confidences.

 

Prenons Henri de Castries. Il est tout de même PDG d'Axa. Pour lui, « les réunions de parents d'élèves, c'est un must. Nous y allons tous les deux, mon épouse et moi ». Gilles Pellisson lui, est le boss du groupe Accor et son truc, c'est le caméscope, avec lequel il ne rate pas un spectacle d'école. Quant à Christian Nibourel, président d'Accenture France, c'est un homme plutôt cash. Il se livre dans ce livre et évoque l'aspi, qu'il passe, l'hypermarché, qu'il arpente, et les larmes, qu'il verse à l'occasion. D'autres avouent leurs manques et se flagellent de ne pas en faire assez à la maison. Mais tous comprennent et font ce qu'il faut pour que leurs collaborateurs et surtout trices puissent s'épanouir entre le Yin du boulot et le Yang de la maison. Plus féministe qu'une entreprise française, tu meurs.

 

Et les rabats-joie qui brandissent leurs études pour rappeler le manque de parité, le plafond de verre en pyrex incassable, le temps partiel subi et les tâches ménagères réservées aux femmes, ne sont que des survivantes d'un MLF soixanthuitard et brûleur de soutien gorge. Alors que la Journée de la femme, c'est du positif, de la joie, du bonheur, une occasion de faire taire ceux qui voient le mal partout.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 8 mars 2010

 

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Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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