Profil de "neet" ou tête de "limbo"

Sylvia Di Pasquale

À chaque époque ses petits noms. À chaque période sa manière de désigner les « jeunes », les habitants de cette lointaine planète étrange et inconnue. Avant, quand tout allait bien ou mieux que maintenant, on les traitait de Tanguy, de génération X ou Y. On évoquait un trait de caractère, une façon d'être, mais toujours leur manière de se définir par rapport à leurs aînés. Terminé.

Aujourd'hui que les choses se crispent, on voit surgir de nouveaux sobriquets, qui définissent uniquement les 15-24 ans dans leur rapport au travail. Ils sont devenus « neets » ou « limbos », sont chômeurs ou déclassés. « Neets », l'acronyme de « neither in employment nor in education or training », peut se traduire gaillardement par « ni salarié, ni étudiant, ni stagiaire ». On avait repéré les premiers neets il y a quelques années déjà au Japon, mais ce n'était alors qu'un petit groupe plutôt marginal. En réaction à leur éducation, à la pression nipponne sur la compétition à l'école puis au boulot, ils avaient décidé par eux-mêmes de tout arrêter.

Sauf que les nouveaux neets, évoqué par John Martin, directeur de l'emploi à l'OCDE n'ont pas choisi leur statut. Pour cet observateur, ils seraient 22,3 millions, soit 12,6% des jeunes vivants dans les trente pays plutôt riches répertoriés par l'organisme. Pas rien.

Surtout si l'on met ce pourcentage en parallèle avec le taux de chômage des 15-24 ans dans ces même pays, où il atteint 17,3%.

Bon d'accord, tous les jeunes ne sont pas totalement désœuvrés et sans le début du moindre bagage scolaire. Il y a aussi les « limbos ». C'est le sociologue Louis Chauvel qui a détecté le phénomène et l'a décrypté pour le quotidien La Tribune. Pour lui, c'est la « génération des limbes », émergeante aux Etats-Unis. Ce qui la distingue des autres jeunes ? Leur « over-qualification » universitaire. Et leur déclassement social. « Ils ne trouvent pas d'autres jobs que celui de "bar manager" ou de "MacDo specialists". »

Alors, devant la montée de ces phénomènes, ces scrutateurs de la jeunesse exhortent les gouvernements à s'en occuper. Certes, ils ont d'autres chats à fouetter, d'autres urgences à résoudre ces temps-ci, plutôt que de se concentrer sur un faible pourcentage de la population. Mais ils devraient observer de plus près le mouvement des indignés Espagnols, comme celui de leurs cousins Israéliens. Ils devraient même étudier de plus près les récentes émeutes anglaises. Et se demander de quel bois se chauffaient les jeunes qui y ont participé.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 19 septembre 2011

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Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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