Quelques grammes de handicap dans un monde de pros

Sylvia Di Pasquale

Lorsqu'une démarche nous semble juste, on applaudit. Mais on s'engage aussi. Ainsi, Cadremploi.fr a décidé de s'associer à la 11ᵉ Semaine pour l'emploi des personnes handicapées qui se déroulera du 12 au 18 novembre prochain partout en France et de soutenir les actions de l'Agefiph. Car les discriminations, moins on en parle, plus elles se propagent.

Alors vous allez en entendre parler. Ici, mais aussi à la télé et dans la presse via une vaste campagne diffusée en octobre et novembre visant à changer le regard sur le handicap. Et puis, de nombreuses manifestations sont prévues dès lundi prochain dans toutes les régions de France. C'est qu'aujourd'hui encore, lorsque l'on évoque l'accès à l'emploi des personnes handicapées, certains recruteurs ont tendance à regarder ailleurs. Tout comme certains salariés d'ailleurs. Evidemment, tout le monde est d'accord pour faire la charité. Mais faut pas mélanger le business et les bonnes œuvres. Chacun à sa place et la solidarité sera bien partagée. Bien évidemment, le propos de l'Agefiph n'est pas là. Personne ne réclame l'aumône, ni l'organisme, ni les handicapés qui souhaitent s'insérer. Ils veulent juste travailler, au moins aussi bien que les autres, si ce n'est exactement comme les autres. S'il n'y avait quelques réticences.

Tenez, commençons par écrabouiller l'une des plus fameuses : l'aménagement du poste de travail. Dès que l'on évoque le recrutement d'un homme ou d'une femme souffrant d'une incapacité quelconque, flotte dans l'air un refrain où il est question de rampe d'accès, de portes automatiques ou de bureaux sur-mesure. Or, selon l'Adapt, 90% des travailleurs handicapés n'ont nul besoin de recourir à de tels aménagements. Mais d'autres motifs de reculade devant de pareils recrutements sont tout aussi faciles à botter en touche. A commencer par la difficulté d'intégration d'une telle personne. Or, tant les responsables d'insertion de l'Agefiph que les dirigeants d'entreprises ou les collègues de travail eux-mêmes, sont étonnés du lien social qu'une personne handicapée peut créer au sein d'une équipe. Dans un cadre professionnel, où chacun est sensé laisser sa sensibilité au vestiaire pour endosser son uniforme de professionnel, la solidarité, jusque-là remisée, peut à nouveau s'exprimer autour d'un nouveau venu qui, parfois a besoin d'un coup de main et qui, souvent est avide de contacts. Peut être parce que lui ne s'est pas délaissé de sa sensibilité au vestiaire. Ce que les managers tentent d'obtenir à grands coups d'incentives, de kick off et d'autres séminaires peut ainsi se mettre en place d'une manière beaucoup plus humaine. Et beaucoup moins artificielle. D'ailleurs, selon une étude de l'Adapt, 93% des dirigeants ayant embauchés des personnes handicapées se disent totalement satisfaits de leur choix.

Reste pour tous les autres à franchir le pas. On nous rétorquera à ce sujet que les entreprises sont de plus en plus nombreuses à le faire et que la situation s'est largement améliorée depuis l'instauration de la loi du 11 février 2005. Car celle-ci augmente sensiblement les « contributions financières » que les entreprises qui n'emploient pas le quota minimum de travailleurs handicapés doivent verser. Si le chantage au porte-monnaie a quelques vertus, comme cela semble être le cas ici, prenons-le comme un mal nécessaire. Mais si l'on peut s'en passer et convaincre les dirigeants de ces mêmes entreprises qu'un salarié handicapé n'est pas un salarié au rabais, c'est beaucoup mieux. C'est bien l'objectif visé par cette campagne nationale. On ne pouvait que l'approuver.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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