Qu'il fait bon être jeunes dip, quinquas ou universitaires ces temps-ci

Sylvia Di Pasquale

D'accord, pendant la trêve des confiseurs, faut pas gâcher la fête, faut pas la ramener avec des nouvelles déprimantes et des statistiques dégringolantes. Mais de là à repeindre le tableau conjoncturel en rose Barbie, il y a comme un fossé que certains franchissent d'une enjambée légère et altière. Invité à tchater sur le site de la Tribune, le directeur général de l'Apec (Agence pour l'emploi des cadres) en a fait un maximum pour rassurer les internautes. Cadres jeunes et vieux, en poste ou pas, soyez tranquilles : tout va bien. C'est simple, plus de bonheur, ce serait indécent.

Lorsqu'un tchateur interpelle le DG sur les difficultés supposées des quinquas à trouver un job, la réponse fuse, rapide comme un bouquet de roses en livraison express : « dans ce contexte de crise justement les employeurs découvrent l'intérêt de l'expérience, il y a une prime pour les 20 ans d'expérience ! Profitez-en. Valorisez-vous et oubliez les jeunes ! » Et d'ailleurs, ajoute Jacky Chatelain à l'adresse d'un autre internaute, « Ils sont moins licenciés que les autres ». Pour la simple raison qu'ils coûtent plus chers à licencier que les autres. Mais le boss de l'Apec passe déjà au suivant.

À celui qui se fait du mourron pour les jeunes diplômés qui recherchent un premier emploi et seraient en proie à « une forte désillusion », il répond : « les jeunes diplômés restent confiants. Ils sont d'ailleurs très enthousiastes quant à leur projet dans notre Booster Tour (du nom des salons Apec dans 8 villes de France, NDLR). » Etre jeune issu d'une école de commerce ou d'ingénieur et chercher un job en 2009, c'est donc super sympa. C'est tout aussi chouette d'être bac + 5 universitaire, à la tête d'un master de sociologie Fu Manchu contemplative, puisque, selon le patron de l'agence, « il n'y a pas de formation inadaptée, il y a des employeurs qui n'ont pas encore compris que l'on n'embauche pas des formations mais des individus avec des compétences. » Les employeurs n'ont qu'à faire un effort, diantre. Et les candidats n'ont qu'à choisir les bonnes entreprises, saperlipopette. Comme ils se doivent de choisir les bons cabinets de recrutement.

C'est, en gros, ce que recommande le DG à celui qui se plaint de leur mépris : « notez les, et évitez les ». Donc, si d'aventure on tombe sur une offre béton, pile poil notre profil, on n'y répond pas si elle émane d'un cabinet « méprisant ». Pas grave, de toute façon, on n'a qu'à se baisser pour trouver un job. C'est tellement vrai que les jeunes dip. sont super enthousiastes rien qu'à l'idée d'arriver sur le marché du travail. Que les quinquas bénéficient de la prime à l'expérience. Et que les universitaires sont des individus, pas des formations à côté de la plaque. C'est vrai dans un monde idéal. Dans la vraie vie, c'est moins sûr.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - Lundi 21 décembre 2009

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr - 2009

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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