Rechute de parachutes dorés

Sylvia Di Pasquale

On connaissait les parachutes dorés taillés dans le tissu de la hausse du chiffre d’affaires de l’entreprise. Mais aussi ceux qui ont été tissés dans l’écheveau de l’arnaque pure et simple. Et voilà que l’on découvre au Canada un nouvel avatar du chèque de départ. Ou plutôt un entre-deux, inventé pour les deux ex-dirigeants historiques de BlackBerry qui viennent de toucher un ticket gagnant de 12 millions de dollars canadiens.

Pour ceux qui en seraient resté au téléphone à cadran, à Radiocom 2000 au Bi-Bop ou à Itinéris, petit rappel. RIM (Research in Motion) a inventé le smartphone. Tout simplement. Il fut baptisé BlackBerry et lancé en 1999. Une idée de génie incontestable de deux boss de génie : Mike Lazaridis et Jim Balsillie. C’était il y a 13 ans et, depuis, quelques millions d’autres téléphones à tout faire sont apparus. Chez Apple, notamment. Mais le BlackBerry est, à peu de choses près, resté le BlackBerry. Nos deux co-fondateurs quant à eux ont profité de leur réussite et sont aujourd’hui classés dans les 20 premières fortunes canadiennes.

Sauf qu’à force de rien, à force de se laisser croquer par la Pomme, le Black s’est enlisé. RIM s’apprête à licencier, est obligé d’économiser 1 milliard de dollars et a vu son action dégringoler. Les deux milliardaires ont certes rendu leur tablier il y a quelques mois mais, la semaine passée, le conseil d’administration a décidé de les remercier, en leur octroyant 12 gros millions. Un budget qui comprend du cash, mais pas que. Secrétaire, bureau, voiture de fonction, chauffeur et couverture de santé sont aussi au menu. Pour justifier ces royaux cadeaux, le conseil d’administration a expliqué que les deux garçons ont « révolutionné l'industrie mondiale du sans-fil avec l'introduction du BlackBerry et changé à tout jamais la façon de communiquer dans le monde ».

De fait, le conseil a inventé le parachute d’honneur, sorte d’Oscar du business saluant l’ensemble d’une carrière et l’avancée technologique au service de l’humanité.

Très naïvement sans doute, on pensait qu’un conseil d’administration était une assemblée de têtes froides, pragmatiques et calculatrices. Des gens ne récompensant, ou ne sanctionnant, que des résultats obtenus, ou des stratégies d’échec. Pas du tout. En fait ce sont des historiens et des humanistes. Au Canada du moins.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr – 18 juin 2012

Une réaction ? Un témoignage ? Le forum ci-dessous vous est ouvert.

Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

Vous aimerez aussi :