Rien ne sert de gagner plus de 55 000 euros par an...

Sylvia Di Pasquale

Amis cadres, cet édito n'est pas pour vous. Sauf si vous êtes de nature curieuse. Contrairement à nos chères habitudes, cette info est plutôt destinée aux DRH. A ceux qui sont en train de se demander comment augmenter leurs cadres pour les motiver, et surtout, à quelle hauteur maximum les rétribuer. Enorme casse-tête.

 

Mais détendez-vous, heureux directeur des ressources humaines : on vous a dégotté la solution. Elle nous vient de l'autre côté de l'Atlantique. Selon une étude américaine, il ne faut pas payer les gens plus de 75 000 dollars annuels (environ 55 000 euros), soit un peu moins de 4 600 euros par mois. Sinon, ils sont malheureux comme les pierres.

 

Encore une étude bidon, dubiteront les étudosceptique que vous êtes. Sauf que pas vraiment. Celle-ci est publiée par la revue Proceedings of the National Academy of Sciences par deux chercheurs de l'université de Princeton, dont l'un, a tout de même décroché le prix Nobel d'économie en 2002. Daniel Kahneman, c'est son nom, a épluché avec son collègue, pas moins de 450 000 réponses à des interviews, réalisées sur deux ans, en 2008 et 2009, sur un échantillon de 1 000 personnes pour en arriver à cette conclusion. Et elle est formelle.

 

Le Nobel (dont on ignore le salaire), explique qu'« au-delà de 75 000 dollars, une augmentation du revenu n'amène ni à ressentir du bonheur ni à être soulagé du malheur ou du stress ». Mince alors. Et nous, bêtes que nous sommes, qui nous imaginions que plus on engrangerait de pognon, plus la vie serait trognon.

 

Pas du tout, démontrent les scientifiques économes. « C'est un seuil au-delà duquel des hausses de revenus n'améliorent plus la capacité des individus à faire ce qui compte le plus pour leur bien-être émotionnel, comme de passer du temps avec ceux qui leur sont chers, éviter la douleur et la maladie, et profiter de leurs loisirs ». C'est donc ça : un trop gros salaire implique forcément que l'on bosse encore plus, qu'on ne sait plus comment s'appellent nos enfants, qu'on a mal partout et qu'on stresse tout le temps.

 

Vous savez donc ce qu'il vous reste à faire, amis DRH. A ce cadre qui va rentrer dans votre bureau pour demander une augmentation, vous n'aurez qu'à parler du bien-être émotionnel qu'il doit conserver coûte que coûte. Et que, si vous lui refusez un pécule supplémentaire, c'est pour lui rendre service.

 

Mais dans ce cas, pourquoi ne pas laisser stagner tout le monde dans les bas-fonds smicards, histoire de les rendre plus heureux encore ? Faut rester raisonnable, comme les duettistes de Princeton, pour qui, « la faiblesse des revenus exacerbe la douleur émotionnelle qui accompagne des malheurs comme le divorce, ou le fait d'être en mauvaise santé ou seul. » On a eu chaud à la fiche de paie.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 4 octobre 2010

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Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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