Un licenciement très ordinaire

Sylvia Di Pasquale

On ne va pas refaire le match. Celui du licenciement de l'indétrônable PPDA, s'entend. Reste que la France des téléspectateurs du vingt heures de TF1 s'émeut de son éviction. Du moins 55% d'entre eux, interrogés par l'Ifop pour le JDD estiment que le journaliste le plus populaire de France n'a pas mérité ça.

Evidemment, ce n'est pas à Cadremploi de dire la messe, d'expliquer que le directeur délégué de l'info de la une est viré car il a déplu au très haut, ou au dieu Médiamétrie. En revanche, en tant qu'experts de l'emploi, nous pouvons légitimement décrypter le licenciement de l'un des cadres d'une grande entreprise cotée en bourse et abonnée au CAC 40 il y a peu de temps encore. Car, après tout, il ne s'agit que de cela. Et ça nous regarde.

Donc, PPD aurait été averti de son congédiement par un SMS reçu à Rolland Garros en plein milieu d'après-midi. Passons sur la méthode abrupte, et rappelons qu'une lettre recommandée convoquant le viré à un entretien préalable est obligatoire. Mais il est un détail qui a échappé aux médias médusés et que nous autres, garants de l'ordre et addicts au code du travail, sommes dans l'obligation de relever. Est-ce qu'un manager, responsable de 200 journalistes peut décemment passer ses après-midi à suivre une baballe du côté de la Porte d'Auteuil ? Surtout, avait-il un ordre de mission signé par son N+1 ? C'est que, en cas de sortie non autorisée de son lieu travail habituel, le salarié risque de n'être couvert par aucune assurance.

Reste le cœur du problème : le motif du licenciement. On le sait, l'audience du JT de Poivre est en baisse constante. La direction de TF1 a donc pu évoquer le non respect des objectifs commerciaux pour le mettre à la porte. Sauf que, et c'est la cour de Cassation qui le dit, l'objectif en question doit figurer dans le contrat de travail de notre homme, en CDI depuis 22 ans. En plus, ce motif doit être accompagné d'autres griefs. Qui apparemment ne manquent pas. Du coup, la législation devra se pencher sur ce cas particulier et déterminer si le fait de traiter le président de la république de « petit garçon », peut être considéré comme une faute professionnelle, ou pire comme une faute lourde. Rappelons que dans ce dernier cas, le licencié ne peut bénéficier des indemnités légales.

Mais nous sommes à même de rassurer Patrick Poivre d'Arvor : il pourra néanmoins percevoir ses indemnités chômage. A condition de ne pas refuser deux offres d'emploi raisonnables, à moins d'une heure de son domicile (soit 25 km en Solex). A moins qu'il ne demande sa mise en retraite. Mais comme le présentateur et écrivain a 60 ans cette année, qu'il a commencé à travailler en 1971, et emmagasiné pile poil 37 annuités, il devra racheter deux trimestres manquants.

Cet exposé des faits, on le voit, n'est destiné qu'à rendre service à un cadre en difficulté. Car la législation du code du travail s'applique à tout le monde. Sans discrimination. C'est bien connu.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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