Et si 2021 était l’année des RTT ratiboisées ?

Sylvia Di Pasquale

EDITORIAL – Après une année confinée, les douze mois à venir pourraient peut-être entamer notre quota de journées de réduction du temps de travail (RTT). Et quel est l’un des avantages du statut cadre au forfait jours ? Le supplément de RTT, justement, censé compenser les horaires à rallonge. La tentation des employeurs de s’attaquer à ces jours de congés particuliers est grande. Tout simplement parce que cette mesure est la plus simple à envisager. Explications.
Et si 2021 était l’année des RTT ratiboisées ?

L’idée trace sa route : la relance attendue en 2021 ne se fera pas sans sacrifices. On le sait, la pandémie est à double effet. Après la santé des humains, elle risque d’attaquer celle des entreprises. Dans nombre de secteurs, elles risquent de vaciller et pour tenter de surnager, elles sont tentées d’économiser, de relancer la bonne vieille « variable d’ajustement ».

Jouer sur les RTT reste le moyen le plus simple.

En cas de naufrage, fermetures et licenciements sont au programme. Mais en cas de gros grain, elles risquent d’avoir recours à d’autres procédés.

  • La baisse des salaires ? Difficile à envisager, sauf à en passer par de lourds procédés et un tollé autour de la fin des 35h.
  • Baisser le nombre de jours de congés ? Tout aussi compliqué. Difficile de toucher aux sacro-saintes cinq semaines.
  • On pourrait envisager la suppression de certains jours fériés. Y en a qui ont essayé... Tout le monde se souvient, et Jean-Pierre Raffarin en premier, de sa tentative de « journée de solidarité » qu’il avait instaurée en rendant le lundi de Pentecôte non férié mais férié quand même. 16 ans plus tard, on ne sait toujours pas qui travaille ce jour-là, ni pourquoi. Rajouter d’autres journées chômées sans l’être rajouterais de la confusion à une période qui n’en manque pas.

Alors il reste les RTT, ces jours supplémentaires de congés dont chacun dispose selon des accords spécifiques de branches.

Il suffira d’agiter la carte APC. Ce sigle ne signifie pas Accord Pour la meilleure manière de sortir de la Crise, mais beaucoup plus joliment, et plus perfidement « Accord de performance collective ».

Ce dispositif décidé en 2017 permet, pour faire court, de se sortir d’un coup dur sans avoir à licencier. Les APC pourraient bien se multiplier dans les entreprises concernées. Et, in fine, réduire le nombre de jours de RTT, si les négociations entre directions et représentants du personnel aboutissent.

Du coup, les ouvriers et employés travailleront plus, mais sans pour autant dépasser les limites légales hebdomadaires de 35, 37 ou 39 heures, selon les accords de branches. Mais les cadres au forfait jours, eux, dépasseront toujours ces limites, comme il le font déjà, mais ce dépassement risque de ne plus être compensé. Ou alors il le sera moins.

Il n’est bien évidemment pas question de s’offusquer d’une différence de traitement, et encore moins d’expliquer que les cols blancs seraient mal considérés par rapport aux autres catégories. Mais on peut légitimement se poser une question simple, que de plus en plus de cadres se posent et que ceux qui se voient proposer une telle promotion risquent de se poser : reste-t-il de bonnes raisons d’accepter d’être nommé « cadre » ?

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Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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