
C’est la semaine de tous les dangers. Une semaine ultra-chargée pour Elisabeth Borne, pour les leaders syndicaux et peut-être bien pour les usagers des transports en commun. Car dès demain à l’Assemblée, commence le douloureux examen de la réforme des retraites. On ne va pas ici démêler les avis (tranchés), les études prospectives (opposées) et les solutions (divergentes) qui s’expriment depuis des mois, voire depuis des années, voire depuis 1995, date de la première tentative de réforme (avortée) sur le sujet.
Réforme des retraites : quid des fins de carrière des séniors ?
Mais il est un élément parfois occulté et souvent traité à la légère dans tous les débats récurrents autour du système de retraite et de sa rénovation. Il s’agit du travail des seniors. Pour le gouvernement, l’allongement du temps de travail est un bienfait pour que les quinquas et sexas sans travail retrouvent un job. Puisqu’ils doivent bosser plus longtemps, les entreprises seraient mécaniquement rassurées : elles les recruteraient plus volontiers puisqu’elles les garderaient plus longtemps et ne craindraient plus qu’ils partent trop vite pour toucher leur pension. Une manière d’occulter totalement la montagne d’arguments que les boîtes avancent pour ne pas embaucher des salariés de plus de 45 ans, qu’elles accusent d’être, en vrac, trop chers, pas assez digitaux et ingérables.
Pas de solutions, pas de question
Que peuvent les politiques ? Pas grand-chose car les solutions sont épineuses à imposer.
Certains agitent le chiffon de la formation censée rendre plus longtemps employable des séniors devenus obsolètes. Alors qu’eux, comme nous, savons l’imbroglio du système de formation à la française, sa gabegie financière et son impossible réforme.
L'autre solution évoquée du côté de l’exécutif comme de LR, c’est simple : il suffit de fluidifier le cumul emploi-retraite. La belle affaire, qui pourrait bien faire l’affaire de quelques entreprises désireuses d’employer quelques salariés à peu de frais, en mode « inutile de vous offrir un salaire décent puisque l’État s’en charge déjà », et qui, en tout état de cause, ne concernera que des jobs peu qualifiés. « C’est une trappe à pauvreté », déclarait ce week-end Olivier Marleix, député LR, en contradiction partielle avec son propre groupe parlementaire.
L’autre outil en préparation au ministère du Travail est le fameux « index séniors » censé révéler les entreprises qui ne jouent pas le jeu. « Concrètement nous voulons que les entreprises fassent la transparence sur la place des seniors dans leurs effectifs, leur proportion et leur évolution », explique le ministre, mentionnant une « obligation de publicité » pour les patrons et des « sanctions » en cas de non-respect ».
La faute à la culture des entreprises
Et le ministre de conclure :
La première clé pour l’emploi des seniors, c’est un changement de culture dans les entreprises.
Autrement dit, il faut une réforme sociétale, un vaste chantier qui risque de durer des années, comme celui de la parité femmes-hommes dont les premiers bénéfices ont mis vingt ans à se voir sur le terrain et a été assorti de quotas et de sanctions financières pour les entreprises réfractaires.
Bref, si la réforme est prête à être votée, et adoptée après les discussions devant les assemblées, il est fort à parier que les seniors restent les grands absents sur les bancs, dans les amendements, comme dans les cortèges syndicaux.
Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.