Big désaccord sur la semaine des 4 jours

Sylvia Di Pasquale

EDITO - La Belgique vient de l’adopter mais en France, seules quelques entreprises y sont passées. Pionnières ou exceptions qui vont le rester ? C’est que la semaine de travail compressée sur 4 jours fait débat. Quand 65 % des cadres* friands d’autonomie l’appellent de leurs vœux, les DRH agitent le chiffon rouge de « l’épuisement au travail ». En ces temps de crise énergétique et de pénurie de candidats, la semaine de 4 jours gagne gaillardement des points comme une solution pas si utopique qu'elle n'y parait. Explications.

Repeindre la semaine de travail ? Dessin de Charles Monnier pour Cadremploi

Big désaccord sur la semaine des 4 jours
Repeindre la semaine de travail ? Dessin de Charles Monnier pour Cadremploi

Mine de rien, la voilà qui revient. Qui ça ? La semaine des quatre jours. Ce vieux truc apparu dans les années 90 n’en finit pas de faire son retour dans l’actualité. Rappelez-vous, à l’époque, c’est Pierre Larrouturou qui s’en était fait le chantre, soutenu par le ministre Gilles de Robien. Pas vraiment des radicaux Insoumis puisque le premier est un socialiste catholique bon teint, et le second, vicomte, est membre de l’UDF.

Mais le temps a passé, les 35 heures s’en sont mêlées et on a mis de côté cette semaine de travail compressée sur 4 jours. Jusqu'à ces derniers temps où la Belgique l’a adoptée. le 29 septembre dernier.

La semaine de 4 jours revient à travailler autant mais sur moins de temps.

Travailler 4 jours sans réduire son temps de travail

Comment ! Après des années à répéter les mots clés de « productivité », et du « travailler plus », la France ferait marche arrière ? Peut-être que, grâce à l’exemple d’Outre-Quiévrain, on pourrait arrêter de tout confondre : les quatre jours, la réduction de temps de travail, les 35 heures et le droit à la fainéantise chère à Sandrine Rousseau.

Car en Belgique, le temps de travail légal est toujours de 39h, et les salariés qui ne souhaitent plus travailler 5 jours par semaine peuvent répartir leurs horaires sur les quatre restants. Ailleurs en Europe, l’Espagne et l’Angleterre l’expérimentent, après l’Islande il y a quelques années

Et nous, qu’est ce qu’on attend ? Certaines entreprises françaises tentent l’aventure, et visiblement, elles n’en sont pas mécontentes comme le disent les employeurs dans notre enquête « Passées à la semaine de 4 jours payée 5 jours, ces entreprises ne le regrettent pas »

La semaine de travail compressée sur 4 jours fait son chemin chez les salariés mais pas chez les DRH.

Des DRH plutôt circonspects

Chez les DRH, cette semaine de travail compressée ne fait pas l'unanimité. Selon l'ANDRH, cette organisation risque de provoquer un manque d'équité entre les salariés des différentes entreprises mais aussi un problème de santé au travail :

On a déjà des différences entre les salariés des petites et des grandes entreprises, entre les salariés qui peuvent faire du télétravail et ceux qui ne peuvent pas, entre ceux qui ont des horaires très contraints et ceux qui n’en n’ont pas. Ça peut faire exploser la société au sens de l’entreprise, mais aussi au sens de la société.
Benoit Serre, directeur délégué Association nationale des DRH (ANDRH) sur RMC le 4 octobre 2022

Risque d'inéquité mais aussi risque de surmenage au travail, estime l'ANDRH :

Cela va forcément impacter l’organisation du travail et avoir un effet sur le bien-être des salariés qui, sans réduction de la quantité de travail, en ressortiront épuisés et finiront par le payer cash
Audrey Richard, présidente nationale de l'ANDRH lors de la conférence de présentation d'une étude sur les enjeux RH

Des contrarguments conjoncturels

Mais face à ces chiffons rouges, la semaine des quatre jours a de nouveaux arguments à faire valoir. Avec la crise énergétique qui arrive, peut-être qu’une partie de l’industrie aurait tout à gagner à ne faire tourner ses lignes de production et ses puissants fours qui fonctionnent au gaz ou à l’électricité uniquement quatre jours par semaine ? 

Et peut-être que l'autre crise, celle des recrutements due à une raréfaction des candidats mais aussi aux nouvelles exigences de candidats soucieux de ne pas passer leur vie au travail, pourrait faire gagner des points à la semaine des 4 jours. Car les boîtes qui l'adopteront pourraient bien avoir un avantage décisif sur celles qui promettent l’éclate au travail sur l’air du « venez chez nous, on travaille sans contraintes. et surtout pas avec des horaires, ce truc de l'ancien monde »  Une fausse coolitude qui fait fuir les cohortes des générations X, Y et Z, pas dupes.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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