Quelle retraite suite à une expatriation ?

Nathalie Alonso

Vous l'avez décroché, ce poste à Singapour. Mais, de l'autre bout du monde, votre travail sera-t-il pris en compte pour votre retraite ? Cécile Cottin-Dusart, avocate spécialiste de la mobilité internationale chez Vaughan Avocats, vous explique comment et quoi faire pour ne pas en perdre une miette.

Le cadre sur le départ n'a en principe rien à faire. C'est à son employeur de faire les démarches liées à son expatriation et qui concernent les droits à la retraite de son salarié. Avant le départ néanmoins, mieux vaut ne pas faire l'impasse sur une discussion avec le dit patron, ne serait-ce que pour connaître les effets d'un départ sur sa fiscalité et la retraite future.

Conséquence d'une expatriation sur le montant de la retraite

Selon que vous soyez détaché ou expatrié, les écarts peuvent être importants au moment du calcul de votre retraite.

Vous êtes détaché ? Aucune conséquence à prévoir sur le montant de votre pension : votre employeur continue de cotiser en France comme si vous y étiez. Cette formule peu contraignante est souvent adoptée par l'entreprise lorsque la mission dure moins d'un an.

Mais si vous partez en tant qu'expatrié, ou que vous vous rendez dans un pays hors UE, lisez attentivement ce qui suit.

Travail hors UE et droits à la retraite

En tant qu'expatrié, vous n'êtes plus couvert par le régime obligatoire. L'entreprise cotise donc dans le pays d'accueil. Au moment de la liquidation de votre retraite (la demande doit être faite 3-4 mois à l'avance), vous pouvez vous adresser, au choix, à la caisse du dernier État dans lequel vous avez cotisé ou à la caisse de votre lieu de résidence. Si vous n'avez jamais travaillé dans l'État dans lequel vous résidez au moment de la liquidation de votre retraite, la demande est automatiquement transférée à l'institution du dernier État dans lequel vous avez cotisé.

Dans tous les cas, l'institution compétente interrogera toutes les institutions des pays dans lesquels vous avez travaillé, France comprise.

Chaque institution procède alors à un double calcul selon les principes de totalisation et de proratisation des droits.

- Calcul de la pension nationale en ne tenant compte que des périodes cotisées dans l'État où la demande est faite.

- Calcul de la pension communautaire : l'intégralité des périodes travaillées en France et à l'étranger est prise en compte pour l'ouverture de ces droits et pour le calcul. Ainsi, si vous êtes en Espagne lors de votre demande, et que vous n'avez là-bas pas assez cotisé, la caisse de retraite espagnole vérifiera combien de trimestres vous avez totalisés en France et ailleurs.

Pour établir le montant de la retraite, chaque institution calcule une pension « théorique » en tenant compte de tous les trimestres cotisés en Europe comme s'ils l'avaient été dans l'Etat en question. Puis cette pension théorique est réduite au prorata du nombre de trimestres travaillés dans cet Etat.

Le montant le plus avantageux est versé par chaque institution. Au final, vous percevrez des « bouts de retraite » de la France et d'un ou plusieurs autres pays.

Et si la mission se déroule hors UE ?

Avant le départ, vérifiez l'existence d'une convention bilatérale entre le pays d'accueil et la France.

- Dans le cas d'une convention, souvent, là encore, les principes de la totalisation et proratisation des périodes travaillées s'appliquent lors de la liquidation de la retraite (lire ci-dessus).

- En absence d'une convention, au moment de la liquidation, c'est au salarié d'entreprendre des démarches auprès de l'administration des retraites du ou des pays dans le(s)quel(s) il a travaillé.

Or cela peut vite devenir un casse-tête : « il vous sera parfois demandé de résider dans le pays de la demande et dans la plupart des cas vous n'aurez même pas cotisé suffisamment pour ouvrir des droits. Vous aurez donc beau avoir travaillé dans ces pays, cela ne comptera pas pour votre retraite », explique Cécile Cottin-Dusart. Pour contourner ce problème, il est conseillé de se rattacher à la Caisse des Français de l'étranger (CFE) pour la retraite de base et à l'IRCAFEX (régime cadre et assimilés) pour la complémentaire.

Cotiser à la Caisse des Français de l'étranger

L'employeur peut être obligé d'affilier son salarié à la CFE, lorsqu'une convention collective ou la politique de mobilité internationale de l'entreprise le prévoit. « Dans un cas contraire, le salarié doit négocier le financement de cette solution de prévoyance avec son employeur. Cela fait partie du package salarial avant le départ. Il pourra en tout état de cause s'affilier à titre individuel», conseille l'avocate.

En général, le coût pour le salarié n'est pas plus élevé que celui qu'il aurait supporté s'il était resté en France. Sauf que la retraite d'un expatrié est souvent moins élevée que celle d'un cadre ayant effectué toute sa carrière en France. Pour éviter les mauvaises surprises, surtout si on est expatrié hors UE ou dans un pays sans convention bilatérale, il est recommandé à l'employeur ou au salarié de cotiser en plus à la CFE / IRCAFEX même si ce dernier est déjà affilié au régime général du pays d'accueil.

La retraite complémentaire, comment ça marche ?

Avant de mettre les voiles, sachez que les périodes travaillées à l'étranger ne sont pas prises en compte dans le calcul de la complémentaire, même à l'intérieur de l'UE ! Mieux vaut donc s'affilier à la CRE / IRCAFEX (lire ci-dessus) d'autant que, bonne nouvelle, les cotisations sont souvent inférieures à celle de l'AGIRC-ARCCO. Là encore, pensez à négocier avec votre patron !

 

En savoir plus :

- L'article Retraite et expatriation sur le site Cadremploi : www.janticipemaretraite.fr

- Centre des Liaisons Européennes et Internationales de Sécurité Sociale : www.cleiss.fr

- Document : comparaison des conditions d'ouverture des droits dans 3 pays (Source Vaughan Avocats)

 

Nathalie Alonso © Cadremploi.fr

Nathalie Alonso
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