Comment gérer ses stagiaires

Tiphaine Réto

Fini le bleu en stage photocopie. La place du stagiaire dans l'entreprise a changé au point que les « petits jeunes » sont aujourd'hui recrutés et managés presque comme des grands. Pour un partenariat donnant-donnant.

La devise est claire : « Our interns don't make coffee. They make an impact. » Chez Procter et Gamble, le recrutement et l'intégration des stagiaires fait partie de la culture maison.

« 60 % de nos cadres en CDI ont été en stage chez nous, explique Marie-Céline Basri, talent supply de la branche française du leader mondial des biens de consommation. Nous accordons donc une importance primordiale au recrutement de nos stagiaires. » Le process est le même que pour tout candidat : une inscription sur le site emploi et carrières, une batterie de tests et trois entretiens. « Nous n'embauchons pas pour un poste, mais pour une carrière. Il nous faut donc d'emblée ce niveau d'exigence, qui montre que nous sommes dans la pré-embauche. »

A mission sérieuse, recrutement sérieux

Des recrutements longs, pointus et déterminants, comme pour les pros. Ce n'est plus l'apanage de quelques sociétés anglo-saxonnes. En France, les professionnels de l'embauche l'ont bien senti en offrant à leurs clients de vraies prestations pour trouver le stagiaire idéal. Michael Page International plc, par exemple, a lancé il y a plusieurs années le site First Page pour permettre à ses prospects de poster leurs annonces. 1500 offres de stage y sont répertoriées et près de 20 000 candidats, universitaires, étudiants en école de commerce ou d'ingénieur, y sont inscrits.

« Les stagiaires ont désormais des missions sérieuses à accomplir. Les entreprises se doivent donc d'avoir un recrutement sérieux, explique Sébastien Hampartzoumian, Managing Director de Page Personnel. Même si l'objectif d'un stage est de comprendre les rouages de l'entreprise plutôt que de lancer un nouveau business. »

Attirer les meilleurs

Chacun sa place, mais une place pour chacun. C'est aussi l'avis de Jean-Marc Lasserre, directeur du Business Unit du cabinet Merlane. « J'ai en permanence deux stagiaires dans mes services qui sont là pour des durées d'au moins six mois. Je les place dans les mêmes conditions de travail que mes collaborateurs. Ils sont intégrés à chacune des réunions internes et ont des objectifs clairs à atteindre. En revanche, je ne les envoie jamais au front chez les clients. C'est trop risqué et pour eux et pour nous. »

Pour lui, le challenge est évident : « Les jeunes sont de plus en plus pros dans leurs recherches de stage. Il faut avoir de bons arguments pour attirer les meilleurs. » Même avis chez Procter et Gamble. L'entreprise va d'ailleurs directement sur les campus pour des séminaires de deux jours et demi pendant lesquels sont présentées les fonctions et les métiers du groupe. « Nous proposons également des stages à l'étranger, ce qui attire énormément les jeunes diplômés. »

Des rétributions en hausse

Reste que les « bons arguments » commencent souvent par une rétribution intéressante. « Les stages aux 30 % du Smic réglementaires, aujourd'hui, attirent moins de candidats observe Sébastien Hampartzoumian. Les stagiaires sont de plus en plus attentifs aux rémunérations. » Chez Procter et Gamble, cela va de soi : « Il est impératif que les stagiaires aient de quoi subvenir à leurs besoins pendant toute la durée du stage, reprend Marie-Céline Basri. Les indemnités varient selon la durée de leur passage chez nous, mais elles peuvent aller jusqu'à 1600 euros dès 9 mois de stage. »

Chez Marlane, le « salaire » du stagiaire est plus modeste, bien que déjà avoisinant les 800 euros. « Mais les stagiaires touchent leur part sur les répartitions d'honoraires de mission. C'est un symbole auquel je tiens. Et cela participe énormément à l'intégration dans l'équipe », souligne Jean-Marc Lasserre.

Prendre le temps d'intégrer

L'intégration, l'autre pierre angulaire du stage réussi. « Un stagiaire a besoin d'être accompagné, prévient Sébastien Hampartzoumian. Quand il est laissé seul le jour de son arrivée, sans que personne ne sache qui il est et quelle est sa mission, l'implication comme la motivation peuvent être altérées. » « A chaque arrivée de stagiaire, nous prenons le temps de présenter l'entreprise et les différents services pour qu'il se sente rapidement à l'aise pour se mettre au travail, précise-t-on chez Procter et Gamble. Ensuite, le tuteur du stage est là pour l'écouter, le recadrer dans ses missions s'il y a besoin. »

Idem chez Marlane : « Je pose aussi dès le début la question du rapport de stage, prévient Jean-Marc Lasserre. Ca me permet d'épauler chacun dans la réalisation de ce mémoire, éventuellement de l'aiguiller sur un sujet et de l'aider à s'organiser pour qu'il ne se retrouve pas le dernier mois absent trois jours par semaine pour la rédaction du fameux rapport ! »

La construction d'une image de marque

Aucune attention, donc, n'est négligée pour l'épanouissement du stagiaire... Et pour cause : « Campus ou réseaux sociaux, le bouche-à-oreille va très vite, reprend Marie-Céline Basri. Et l'image de marque d'une entreprise se construit aussi par sa politique d'accueil des stagiaires. »

 

Tiphaine Réto © Cadremploi.fr

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Tiphaine Réto

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