RENDEZ-VOUS !!

Le DRHache

Mais pas à n'importe quel prix, et pas n'importe comment, nous explique le DRHache.

Faut-il se rendre au grand Corporate, au monde de l'entreprise, au grand capital aurait-on dit à une époque ? Tout commence en général par un entretien. Où vous viendrez parler de vous, raconter votre histoire au recruteur blasé qui finalement ne souhaitera entendre qu'une déclaration d'amour au monde qu'il représente. Et la renonciation à l'insouciance de votre jeunesse. Elle aura souvent été besogneuse cela dit. Vous serez passé par l'école de l'excellence (dans laquelle on sur-travaille pendant deux ou trois ans et où l'on boit pendant les trois ans qui restent, pour évacuer les trop-pleins de ruisseaux bouillonnants qui forgent notre caractère).

Dans ce parcours préformaté, on aura même prévu pour vous le petit passage par l'humanitaire : la mission de trois mois dans les Andes pour construire un hôpital, au Vietnam pour bosser dans les rizières en hommage involontaire à l'Angkar, ou en Inde pour les fondations d'une école. Vous en aurez en général profité pour faire un voyage touristique pendant le mois qui suit, histoire de vous enrichir des splendeurs exotiques de ces pays si pauvres.

Rentré en France, vous serez donc happé par la peur du vide qui accompagne la fin des études supérieures. Vous sentirez que la sollicitude des parents chez qui vous vivez toujours commence à se transformer en légère tension diffuse, et qu'il va falloir monétiser un peu l'investissement des 25 dernières années, ne serait-ce qu'en trouvant un job et en volant de vos propres charges. De vos propres ailes, pardon.

Vous cherchez donc d'un emploi. Et l'on vous a bien expliqué qu'il valait mieux commencer dans une grande maison pour pouvoir ensuite vendre cette "bonne école" à de plus petites structures moins organisées, mais plus rémunératrices.

Vous avez donc décroché ce premier "rendez vous" avec un DRH. Et vous êtes prêt à vous rendre, en effet, à renoncer à vos quelques idéaux et à sacrifier les vagues idées qu'il vous reste sur l'autel des 35 000 euros par ans.

Oh, il n'y aura pas de messe noire, pas besoin de marcher sur un crucifix comme dans le Japon du 17ᵉ siècle. Au contraire, on essaiera de vous vendre les valeurs de la maison, qui ressemblent étrangement à celles d'un catéchisme athée mâtiné de corps d'armée : réactivité, ambition, persévérance, pugnacité, empathie, combativité.

Vous pourrez ainsi vous parer de ces belles valeurs et transporter les montagnes de la fidélité, au sommet desquelles les neiges éternelles (le management) scintillent et laissent parfois couler un filet d'eau glacé entre vos omoplates (la "stratégie", ou dans les pire des cas les "synergies").

Vous pourrez épouser tout cela.

La reddition viendra plus tard, lorsqu'il vous faudra appliquer des instructions parfaitement contraires aux principes susmentionnés. Prôner l'ouverture et ne recruter que des grandes écoles. Prôner la diversité et ne promouvoir que des hommes. Prôner la pérennité et fermer des départements entiers. Prôner la mobilité et laisser pourrir les fruits sur l'arbre.

Alors, faut-il se rendre au rendez-vous?

Bien sur.

Car si vous voulez changer le système, il faut être dedans.

La DRHache © Cadremploi.fr

 

 

 

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