Salariés-athlètes: des collègues pas tout à fait comme les autres

Sébastien Tranchant

On a tendance à l'oublier mais ce n'est pas parce qu'on est champion que l'on vit forcément de la rente de contrats publicitaires. Bien souvent, une fois les projecteurs éteints, les sportifs de haut niveau reprennent en toute simplicité leur vie de salarié. Quelles sont les entreprises qui embauchent nos porte-drapeaux ? De quels avantages bénéficient-ils en interne pour demeurer au top physiquement?

A l'instar d'Alain Bernard (natation), Steeve Guénot (lutte) ou encore Yohann Diniz (marche), ils sont des milliers en France à associer excellence sportive et statut de salarié. Car tous les sports ne sont pas médiatiques et qu'il faut bien gagner sa croute comme tout le monde. A la Fédération française d'athlétisme (FFA) existe depuis douze ans une cellule socioprofessionnelle dont l'objectif est d'aider les athlètes à anticiper l'avenir. « Toutes les disciplines ne permettent pas une reconversion dans le milieu sportif. C'est pourquoi nous incitons nos champions à rechercher un emploi », rapporte Vincent Clarico, chargé du suivi socioprofessionnel à la FFA. La signature, le 22 juillet dernier, d'un partenariat avec le groupe Vedior France prévoit le développement prochain des outils de reconversion mis à la disposition de la « fédé » via notamment une offre de formations diplômantes en alternance.

86 % de fonctionnaires à la FFA

En attendant, ils sont à ce jour 68 sportifs à faire l'objet d'une convention signée entre la FFA et leur employeur. 86 % d'entre eux sont fonctionnaires ou assimilés (SNCF, La Poste, ministère de la Défense, de l'Education nationale, des Finances...),14 % travaillent dans le privé (France Télécom, QOL, Laboratoires Pourquery, cabinets comptables...) et ils sont au total 82 % à bénéficier d'aménagements d'horaires pour continuer leur entraînement.

Malgré les efforts déployés, il y a encore du travail car 20 % des champions de la FFA sont à l'heure actuelle sans emploi. « Ce chiffre est préoccupant et illustre les difficultés sociales auxquelles peuvent être confrontés les sportifs. Trop peu de structures privées leur offrent des possibilités d'insertion professionnelle, reconnaît Vincent Clarico. Ce n'est jamais facile d'expliquer à son patron que vous devez vous absenter pour participer à une compétition sportive. » Dans un autre registre que l'athlétisme, Anne-Lise Touya - quadruple championne du monde de sabre, par ailleurs diplômée de l'ESCP-EAP - et Delphine Racinet - vice-championne olympique de tir catégorie « fosse olympique » - occupent des postes de cadre chez Bouygues construction et montrent que faire carrière dans une boîte privée n'est pas impossible pour les athlètes.

Un mi-temps payé temps complet

Parmi les entreprises comptant de nombreux sportifs dans leurs rangs, on trouve EDF (150 000 salariés) qui emploie une soixantaine d'athlètes, dont environ un tiers bénéficient des aménagements prévus par la convention d'insertion professionnelle signée avec le ministère de la Jeunesse et des Sports. Parmi eux figure le rameur Jean-Christophe Bette, champion olympique en 2000 et double champion du monde en 2001 et 2005. Employé depuis 2004 comme agent de maintenance au centre nucléaire de production d'électricité (CNPE) du Bugey (Ain), il travaille 16 heures par semaine ce qui lui laisse le temps de pratiquer l'aviron. « Jean-Christophe a été affecté à ce CNPE car il se trouvait à proximité du Grand parc Méribel Jonage où il est possible de s'entrainer. Son contrat de travail est un CDI à temps complet mais nous l'autorisons à ne travailler qu'à mi-temps. C'est en quelque sorte la contribution de l'entreprise à sa réussite de sportif de haut niveau », explique Martine Emprin, conseillère RH au CNPE du Bugey. Le temps de travail du rameur est aménagé sur la base d'un mi-temps annualisé ce qui lui donne la liberté de pouvoir honorer des rendez-vous sportifs calés à l'avance. Quant à son salaire, il demeure équivalent à un temps plein et en adéquation avec la qualification de l'emploi occupé.

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