S'expatrier avec ses enfants : mode d'emploi

Bruno Askenazy

Partir travailler à l'étranger est souvent une grande aventure de famille, souligne l'Observatoire de l'expatriation dans son dernier livre blanc. Tous nos conseils d'experts pour y embarquer vos enfants... dans les meilleures conditions.

Pour 94 % des parents, l'expatriation est très profondément vécue comme une expérience familiale. C'est ce que révèle le dernier livre blanc de l'Observatoire de l'expatriation. « Les expats savent qu'ils donnent à leurs enfants une chance d'être exposés à une nouvelle langue, une nouvelle culture, un environnement social souvent privilégié et une capacité d'adaptation extraordinaire dans un contexte grandissant d'internationalisation, analyse Patricia Glasel, directrice de Berlitz Consulting France. C'est vrai, mais il faut aussi savoir se préparer à quelques écueils pour que tout se passe au mieux. »

En 2010, la branche française de l'organisme linguistique a accompagné près de 2000 familles à l'expatriation. « Dans 33 % des cas, poursuit Patricia Glasel, le processus adaptatif est un défi pour l'un des enfants. »

Plus compliqué pour les ados

Premier concernés : les adolescents. « Les enfants en bas âge ont avant tout besoin du cocon parental pour se sentir bien. Ils se contentent souvent de suivre et s'adaptent à leur nouvel environnement beaucoup plus facilement », note Sophie de Puybaudet, coach pour expatriés.

Même observation pour Patricia Glasel : « Les ados sont très attachés à la sphère sociale qu'ils commencent à se créer vers 10-12 ans. C'est difficile pour eux d'y renoncer pour tout recommencer, souvent dans l'univers réduit de la communauté des expats. »

Se préparer soi-même pour bien préparer ses enfants

Pas de panique pour autant, préviennent les spécialistes : l'expatriation se passe d'autant mieux que les deux parents sont contents de partir. « Ce qui signifie que le conjoint ou la conjointe doit préparer son propre projet d'expatriation et ne pas se reposer sur la carrière de l'autre », affirme Sophie de Puybaudet. « C'est étonnamment sous-estimé, confirme Patricia Glasel, mais dans 75 % des cas, lorsque l'expatriation est un échec, c'est parce que le conjoint n'a pu trouver sa place. Et c'est un vrai défi pour 53 % des partants. »

Pour préparer vos enfants, donc, sachez au mieux vous préparer. « Tout en restant très à l'écoute des difficultés des jeunes, précise Patricia Glasel. Dans les premiers mois, ils peuvent avoir du mal à trouver leurs marques, se sentir isolés, notamment à l'école, où ils ne comprennent pas forcément la langue utilisée dans la cour de récré. Il faut bien prendre en compte cette angoisse, expliquer qu'elle est normale et qu'elle n'a rien à voir avec une quelconque faiblesse. »

Ecole française ou système international ?

La question de l'école est au demeurant primordiale. Faut-il préférer un système français, généralement très bien représentés à l'étranger, une école locale ou un lycée anglophone ? « Tout dépend vraiment du projet de vie des parents, insiste Sophie de Puybaudet. On ne fera pas les mêmes choix s'il s'agit d'une expatriation momentanée avec un retour en France déjà programmé ou une succession d'expatriations. » « Il faut en tous cas bien y réfléchir, approuve Patricia Glasel, car vous ne donnez pas les mêmes bases culturelles à vos enfants selon qu'ils passent par un système anglophone ou francophone. Certains bons élèves se sont retrouvés en situation d'échec en France car ils n'avaient jamais structurer leur pensée pour le système scolaire français. »

Une éducation qui se fait aussi au quotidien au sein de la famille. « Qu'on revienne en France ou non, c'est très important de garder un ancrage dans son pays d'origine », constate Patricia Glasel. « Citoyen du monde, c'est un joli concept, sourit Sophie de Puybaudet, mais dans les faits c'est très difficile et beaucoup d'enfants se retrouvent perturbés s'ils se sentent coupés de leurs racines. »

Et si vraiment ça coince ?

Fréquenter les alliances françaises, parler du pays et conserver des liens avec sa famille et ses amis restés en France est donc essentiel pour la famille entière. « Aujourd'hui avec Skype ou Facebook, c'est beaucoup plus facile », remarque Sophie de Puybaudet. Mais rien ne vaut des retrouvailles régulières en France. « Personnellement, ça me fait toujours peur quand je vois des gens qui vendent tout avant de partir, reconnaît Patricia Glasel. Je conseille vraiment de conserver une maison, un appartement pour pouvoir venir se ressourcer au moins une fois tous les deux ans. »

Mais que faire si le grand de la famille ou le petit dernier ne veut pas repartir ? « C'est une décision très difficile à prendre, mais si vraiment l'acclimatation se passe mal, on peut choisir de renvoyer un enfant étudier en France, vivre chez les grands parents quand c'est possible ou dans un internat si on en trouve un. » Une solution de dernier recours, mais qui se généralise au moment de l'entrée en fac d'un membre de la fratrie.

Bruno Askenazi © Cadremploi.fr

Bruno Askenazy
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