Êtes-vous vraiment fait pour télétravailler ?

Elodie Buzaud

On ne cesse de vanter les bienfaits du télétravail, mais on oublie de dire qu’il n’est pas fait pour tous les salariés. Vous faites peut-être partie de ceux qui perdent du temps en s’y lançant…
Êtes-vous vraiment fait pour télétravailler ?

Bien-être et productivité sont des bénéfices souvent cités pour la mise en place du télétravail. La réforme du code du Travail facilite d’ailleurs désormais le recours à cette forme de travail et les entreprises doivent justifier son interdiction. Mais travailler un à deux jours par semaine loin de son manager et/ou de son équipe n’est pas évident pour tout le monde.

 

Humble et introverti

On a beau être un cadre qualifié, expérimenté et autonome, on n’a pas forcément le profil d’un télétravailleur –bien sûr on ne parle pas ici d’un jour de télétravail pris au gré d’une livraison ou d’un rendez-vous chez le médecin. Aux États-Unis, le télétravail est bien plus répandu et certaines études abordent spécifiquement les profils les plus aptes. C’est notamment le cas des travaux de Maureen Hannay, étudiante à l’Université de Troy, publiés dans le Journal of management and marketing research. Elle suggère aux entreprises d’utiliser le test de personnalité Myers-Briggs Type Indicator (MBTI) pour sélectionner les salariés les plus aptes au télétravail, soit, selon elle, les personnalités se rapprochant le plus possible de la classification ISTJ. Les  "ISTJ" - I pour Introversion, S pour Sensation, T pour Thinking et J pour Jugement - sont des personnalités introverties qui raisonnent de façon concrète selon des critères objectifs et planifient leurs activités. Elle suggère également que tous les managers ne sont pas faits pour gérer une équipe en télétravail et que les plus à même de mener à bien cette mission sont ceux qui se positionneront en "leader serviteur", concept qui définit une attitude managériale basée sur l’humilité, la gratitude, le pardon et l’altruisme.

Lire aussi : Télétravail : comment être efficace toute la journée

 

Autonomie, autorégulation et auto-motivation

« Le télétravail nécessite de l’autorégulation et de l’auto-motivation », déclare Clément Roucher, manager chez Greenworking, cabinet de conseil spécialiste du télétravail. L’organisation est même cruciale puisqu’à un ou deux jours par semaine (forme du télétravail la plus répandue en France), il faut savoir utiliser son temps et le consacrer aux tâches auxquelles le télétravail est le plus profitable : celles qui nécessitent du calme, de la concentration et pour lesquelles il est particulièrement bénéfique de ne pas être interrompu. Mais « certains ont un mal fou à gérer leur temps : soit, ils travaillent trop longtemps, soit pas assez ! », constate Yves Lasfargues, directeur de l’Observatoire du télétravail.

 

Êtes-vous bien "équipé" ?

Les spécialistes sont unanimes : il faut aussi être équipé pour télétravailler, avec, un poste de travail chez soi - travailler sur son canapé n’est définitivement pas recommandé. Il faut aussi avoir une famille "télétravail compatible", pas comme le célèbre analyste politique Robert Kelly dont l’interview de la BBC a beaucoup fait parler de lui cette année, et surtout de ses enfants.

 

Savoir gérer son stress, et son réseau

À l’heure où le stress chez les cadres augmente et où la frontière vie pro/vie perso s’estompe, le télétravail ne doit pas devenir un coupable supplémentaire. Un récent rapport de l’ONU pointe les risques d’augmentation du stress liés au télétravail chez les salariés très mobiles. « Il faut que le télétravailleur sache gérer son stress et donc, ait un réseau professionnel sur qui il peut compter en cas de problème », conclut Yves Lasfargues.

 

Pas de télétravail à plein temps sans expérience du télétravail

Avec le télétravail qui se développe, se pose aussi la question du télétravail à temps plein. À la tête d’Anybox, société de services informatiques, Christophe Combelles a choisi un modèle d’organisation libérée sans bureau. Ses 14 salariés sont tous en "full télétravail" et sont basés en région et à l’étranger. D’expérience, il a donc repéré les profils peu aptes à ce télétravail de l’extrême: « typiquement, des personnes qui n’ont jamais eu d’expérience en télétravail ou en indépendant ont du mal à s’habituer. »

 

Moins convaincu par le télétravail ? La bonne nouvelle, c’est qu’en France, il est volontaire et réversible. Ce qui signifie qu’un salarié peut essayer et arrêter si cela ne lui convient pas.

 

Elodie Buzaud
Elodie Buzaud

Le travail et l’écologie sont mes thématiques de prédilection. En tant que journaliste indépendante, je cherche notamment à répondre aux questions que posent ces deux sujets pour mieux comprendre comment le travail, et les travailleurs, peuvent contribuer à la transition écologique.

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