Mention obligatoire de la bonne convention collective sur le bulletin de salaire
Le bulletin de salaire indique l’intitulé de la convention collective applicable (article R 3243-1 du Code du travail). À défaut de convention collective applicable, le bulletin de salaire mentionne les dispositions du Code du travail relatives à la durée des congés payés du salarié et à la durée des délais de préavis en cas de cessation de la relation de travail
La plupart du temps, il s’agit de la convention correspondant à l’activité principale de l’entreprise, déterminée par le code NAF ou APE de l’entreprise.
Néanmoins, il peut arriver que la fiche de paie ne précise pas la convention collective applicable (il s’agit d’un oubli) ou qu’elle précise une mauvaise convention collective (contrairement ou par erreur)
Nous allons le voir, cette mention engage l’employeur.
Quelles conséquences en cas d'indication de la mauvaise convention collective ?
En cas de mention d’une mauvaise convention collective sur le bulletin de salaire, il y a présomption d’application de la convention indiquée. Mais cette présomption peut être renversée.
Il faut opérer une distinction en cas d'application volontaire d'une mauvaise convention collective ou en cas d'erreur.
L’application volontaire d’une mauvaise convention collective
Il arrive qu’une entreprise, non tenue d’appliquer obligatoirement une convention, l’applique volontairement quand bien même elle ne correspondrait pas à l’activité de l’entreprise. Ce sera le cas, en pratique, pour des entreprises dont l’activité principale n’entre dans le champ d’application d’aucune convention collective étendue par arrêté et applicable obligatoirement, ou lorsque l’entreprise n’est pas affiliée à un syndicat signataire.
Si cette décision est volontaire et non équivoque (officialisée par une note de service une communication au personnel, par une mention sur les bulletins de paie), la convention mentionnée sur le bulletin de paie s’applique de manière obligatoire.
Bon à savoir : notez que cette mention ne vaut reconnaissance de l'application de la convention à l'entreprise que dans les relations individuelles de travail (Cour de cassation, chambre sociale, 18 juillet 2000, n°97-44897).
Mais le salarié est en droit de revendiquer l’application de la bonne convention collective, normalement applicable, dans les dispositions qui lui sont le plus favorables. En effet, « si le salarié peut se prévaloir de la convention collective mentionnée sur le bulletin de paie, cette faculté ne lui interdit pas de revendiquer l’application de la convention collective à laquelle l’employeur est assujetti dans ses dispositions qui lui sont plus favorables » (Cour de cassation, chambre sociale, 7 mai 2002, n° 99-44.161).
L’article L. 2262-12 du Code du travail prévoit alors que « Les personnes liées par une convention ou un accord peuvent intenter toute action visant à obtenir l’exécution des engagements contractés et, le cas échéant, des dommages-intérêts contre les autres personnes ou les organisations ou groupements, liés par la convention ou l’accord, qui violeraient à leur égard ces engagements. »
Donc chaque salarié peut agir individuellement devant le conseil des prud’hommes pour réclamer dans la limite des délais de prescription applicables :
- le bénéfice des dispositions de la convention collective de branche qui devait s’appliquer à l’entreprise,
- et le cas échéant des dommages et intérêts.
>> lire aussi : contester la mention d'une convention collective
Erreur dans la mention de la convention collective
C’est le cas de l’employeur qui applique la bonne convention collective mais qui mentionne dans le bulletin de paie, par erreur, une autre convention collective.
La présomption d’application de la convention inscrite reste valable, mais l’employeur peut prouver qu’il s’agissait d’une erreur, notamment en démontrant que son activité principale la rattache à une autre convention et que de bonne foi il n’a jamais voulu appliquer une convention différente que celle relevant de l’activité principale de l’entreprise.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 juillet 2018 (n°17-14699), énonce que « si la mention d'une convention collective sur le bulletin de paie vaut présomption de son application à l'égard du salarié concerné, l'employeur est admis à apporter la preuve contraire ». En l’espèce, la convention collective mentionnée sur le bulletin de paie du salarié ne lui était pas applicable et n'avait jamais été appliquée volontairement par l'employeur. L’erreur sera plus difficile à démontrer si elle s’est prolongée durant plusieurs années.
Bon à savoir : si la mauvaise convention collective, erronée, est mentionnée dans le contrat de travail, le salarié est en droit d’en demander l’application et l’employeur ne peut pas apporter de preuve contraire (Cour de cassation, chambre sociale, 16 mai 2012, n°11-11.100).
Les conséquences de l'oubli de la mention collective
Si le bulletin de salaire ne mentionne pas de convention collective, c’est la convention dont dépend l’activité principale de l’entreprise qui s’appliquera.
Mais au surplus, le salarié sera en droit de demander devant le juge des dommages et intérêts.
La cour de cassation jugeait que « le bulletin de paie doit comporter l'intitulé de la convention collective applicable et que l'absence de cette information cause nécessairement un préjudice au salarié » (voir par exemple, Cour de cassation, chambre sociale, 19 mai 2004, n° 02-44.671). Mais depuis un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 17 mai 2016 (n° 14-21872), le salarié doit démontrer l’existence d’un préjudice.
Bon à savoir : sur certains points, un employeur qui applique la mauvaise convention collective, peut être passible de sanctions pénales (par exemple, en matière de montant des salaires, article R 2263-3 du Code du travail).
Diplômée notaire, Josée Pluchet est passionnée de droit privé, du droit civil au droit du travail en passant par le droit de la construction ! Chargée de veille juridique pour plusieurs sociétés, elle suit avec intérêt et attention les évolutions législatives et jurisprudentielles. Rédactrice juridique, elle a à cœur de rendre le droit accessible aux non-juristes. Elle rédige pour Cadremploi des articles relatifs au droit du travail.