Covid-19 : Peut-on être sanctionné si on va travailler sans dire qu’on est malade ?

Sylvie Laidet-Ratier

DROIT DU TRAVAIL – Un salarié qui vient au travail en étant contaminé ou en ayant des symptômes du Covid risque gros. En plus des conséquences sanitaires et médicales qu’il fait subir aux autres, il risque des sanctions allant jusqu’au licenciement si son employeur réussit à prouver sa faute. Explications et éclairage d’Elise Fabing, avocate associée au sein du cabinet Alkemist avocats.

Si l'on se sait malade du Covid et que l'on décide malgré tout d'aller travailler, on s'expose à des sanctions prévues par le code du travail.

Covid-19 : Peut-on être sanctionné si on va travailler sans dire qu’on est malade ?
Si l'on se sait malade du Covid et que l'on décide malgré tout d'aller travailler, on s'expose à des sanctions prévues par le code du travail.

Dissimuler sa maladie : des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement

Inutile de tourner autour du pot, si vous vous rendez au bureau en vous sachant positif au covid, vous vous exposez à une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. Certes l’employeur a pour obligation d’assurer la sécurité et de protéger la santé et la sécurité du salarié, mais ce dernier a également des devoirs comme le rappelle l’article L4122-1 du Code du travail :

Il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autre personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.
Code du travail, article L4122-1 du Code du travail

En clair, si vous vous pointez dans l’open space ou chez un client en sachant sciemment que vous êtes malade du covid, vous violez ce texte de loi. Et vous encourrez donc une sanction. Au mieux un avertissement, au pire un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Les juges ont déjà approuvé le licenciement d'un salarié qui avait sciemment fait courir un risque à ses collègues « Dans un arrêt du 12 octobre 2017, la Cour de cassation a tranché en ce sens pour un salarié qui avait continué à travailler en état de léthargie due à un traitement médical. Le collaborateur a été licencié pour avoir continué à travailler sachant qu’il n’était pas en état de le faire et faisant courir des risques à ses collègues », commente Élise Fabing, avocate associée au sein du cabinet Alkemist avocats, spécialisée en droit du travail et auteure de « Manuel contre le harcèlement au travail » (Hachette pratique, 2021).

En novembre 2020, les prud'hommes se sont penchés sur le cas d'un salarié qui a été licencié pour faute grave, après être quand même venu travailler alors qu'il attendait les résultats d'un test Covid, qui s'est avéré positif. La décision des prud'hommes n'a pas encore été rendue.

Environ 29% des contaminations hors-foyer ont lieu dans le milieu professionnel.
Site Mes conseils Covid du ministère des Solidarités et de la santé

Que doit faire un salarié positif au Covid-19 ?

Avec une vaccination complète, il faut s'isoler entre 5 et 7 jours. Sans vaccination, il faut respecter une période d'isolement de sept à dix jours. L'Assurance maladie vous adressera un arrêt maladie que vous transmettrez à votre employeur. En théorie, vous n'êtes pas obligé de prévenir votre employeur que vous avez le Covid mais en pratique, le lui dire permettra de ne pas créer un cluster. Vous lui permettrez ainsi de de prévenir les éventuels cas contacts afin d'enrayer la propagation du virus.

Dissimuler sa maladie : c'est à l'employeur d'apporter la preuve de la faute

En cas de contentieux, ce sera à votre employeur d'apporter la preuve que vous vous êtes rendu dans l’entreprise en vous sachant contaminé par le virus. Et dans sa quête de preuves, tous les moyens sont bons :

- « L’employeur va pouvoir s’appuyer sur des témoignages de plusieurs collègues à qui le collaborateur aurait parlé de son résultat positif au test. Ou bien sur des échanges de messages – SMS, WhatsApp, Slack et autres - indiquant par exemple « je suis positif au covid, mais je vais quand même venir bosser,  j’emmerde Macron », illustre Élise Fabing.

- Si d’aventure, vous laissez traîner le résultat de votre test positif sur l’imprimante, votre employeur pourra également s’en servir comme preuve.

 

 

 

Que risque-t-on si on va travailler alors qu'on est "cas contact" ?

Tout dépend de votre schéma vaccinal. Si l'on se réfère au dernier protocole paru le 16 février dernier

  • Une personne "cas contact" au schéma vaccinal complet et non immuno-déprimée n'a pas obligation de s'isoler mais elle doit limiter ses interactions sociales au maximum car elle peut être contaminé(e) et transmettre le virus aux autres. L’obligation est de faire un test immédiatement et des autotests, deux et quatre jours après le premier dépistage. Si elle ne peut pas télétravailler, elle doit maintenir une distance physique avec les autres salariés (en s'isolant dans un bureau individuel quand cela est possible), déjeuner seule, ne pas retirer son masque pour boire un café si un collègue est à proximité, désinfecter toutes les surfaces qu'elle touche, etc. "Elle n’a pas à prévenir son employeur. On n’a pas à donner à son employeur son statut vaccinal. On en revient aux règles qui ont existé et qui n’ont pas posé de problèmes", a affirmé la ministre du Travail, Elisabeth Borne le 4 janvier dernier sur France Télévision.
  • Une personne "cas contact" non vaccinée a l'obligation de s’isoler pendant 7 jours. Si elle ne le fait pas, elle s'expose aux mêmes sanctions que les salariés positifs au Covid, pouvant aller jusqu'au licenciement si l'employeur réussit à prouver qu'il est venu travailler alors qu'elle se savait "cas contact".

Les "cas contacts" non vaccinés pénalisés au Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, IKEA réduit les indemnités maladie versées aux salariés non vaccinés cas contact au minimum légal. Une différence de traitement marquée avec les salariés vaccinés, qui conserveront l'intégralité de leur remboursement. 

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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