Comment fonctionne le chômage partiel pour les cadres ?

Mathilde Hardy

En cas de difficultés économiques d’une entreprise, il n’est pas toujours possible de rémunérer les cadres, ou d’avoir du travail à leur fournir. Le chômage partiel constitue une alternative intéressante dans ces hypothèses. En quoi consiste-t-il ? Comment est-il mis en place ? Cadre au forfait jour, quel salaire toucherez-vous ? Nos réponses.
Comment fonctionne le chômage partiel pour les cadres ?

Qu’est-ce que le chômage partiel ?

Le chômage partiel est prévu à l’article L5122-1 du Code du travail. On parle aussi de chômage technique. Dans la loi, depuis 2013, c’est la notion d’activité partielle qui est utilisée. Le chômage partiel est une mesure qui permet à une entreprise qui a des difficultés économiques, et qui n’est donc plus en mesure de verser la rémunération globale des salariés ou d’avoir du travail à leur confier pour l’intégralité de la durée du travail, de diminuer les salaires et le nombre d'heures travaillées.

Pendant les heures chômées, l’employeur verse au cadre des indemnités d’activité partielle. Le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité. 

Il existe également un dispositif d’activité partielle de longue durée (APLD). Il était possible d’entrer dans ce dispositif jusqu’au 31 décembre 2022. Les entreprises concernées peuvent y avoir recours durant quatre ans, soit jusqu’au 31 décembre 2026. Il concerne les entreprises connaissant des difficultés durables, mais qui ne menacent pas leur pérennité économique. Les entreprises concernées peuvent diminuer les heures de travail de leurs salariés de 40% et ce dans la limite de 36 mois, consécutifs ou non, sur une période de 48 mois consécutifs. Les entreprises doivent avoir signé un accord collectif.

Les cadres sont-ils concernés par le chômage partiel ?

Il n’y a pas de condition d’ancienneté, ni de conditions liées au type de contrat de contrat de travail (CDD, apprentis, CDI, etc.), ni de conditions liées au temps de travail du salarié (temps partiel, temps plein) pour pouvoir bénéficier du chômage partiel. Pour être éligibles à l’activité partielle, les salariés doivent être titulaires d’un contrat de travail de droit français. Ils peuvent travailler à temps plein ou temps partiel, avec un temps de travail classique ou une convention de forfait en heures ou en jours sur l'année. Sont notamment autorisés les cas suivants :

  • Voyageur, représentant et placier (VRP) ;
  • Salarié employé en France par une entreprise étrangère sans établissement en France ;
  • Salarié rémunéré au cachet ;
  • Salarié intérimaire en contrat de mission suite à la suspension, l'annulation ou la rupture d'un contrat de mise à disposition signé ;
  • Salarié en CDI dans le cadre du portage salarial ;
  • Cadre dirigeant en cas de fermeture totale de l’entreprise ou d'une partie de celle-ci (fermeture d'un atelier ou d'un service de l'entreprise par exemple) ;
  • Travailleur à domicile payé à la tâche ;
  • Journaliste rémunéré à la pige ;
  • Alternants.

Sont donc concernés par le chômage partiel :

  • Les cadres qui ont des horaires de travail semblables au reste de l'entreprise ;
  • Les cadres au forfait jours ou heures, que l’activité partielle consiste en une fermeture totale ou partielle de l’établissement ou en une réduction de l’horaire de travail ;
  • Les cadres dirigeants dans le cas de la fermeture temporaire de l’établissement ou partie d'établissement uniquement.

Bon à savoir : les cadres qui se trouvent en congé maternité ou en arrêt maladie sont indemnisés par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM). 

Sont exclus du dispositif les salariés titulaires d’un contrat de travail français mais travaillant à l’étranger, les salariés expatriés titulaires d’un contrat de travail local, et ceux dont la suspension ou réduction de l’activité est provoqué par un différend collectif de travail (en cas de grève notamment).

En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement. L'article 8 de l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 prévoit une individualisation du chômage partiel. Il est désormais possible pour les entreprises de demander le chômage partiel pour un poste ciblé, et non plus obligatoirement à l'échelle d'un service ou d'un établissement, sous réserve de validation par un accord d'entreprise ou d'un avis favorable du comité social et économique. Concrètement, cette individualisation signifie qu’un employeur peut avoir recours au chômage partiel pour une partie seulement de ses salariés, que ce soit au sein d’une même équipe ou non. Il est possible de mettre en place une répartition différente des heures travaillées et des heures non travaillées pour chaque salarié en chômage partiel. 

Quelles sont les conditions à réunir pour placer une entreprise en chômage partiel ?

L'employeur peut placer ses salariés, dont les cadres, en position d'activité partielle lorsque l'entreprise est contrainte :

  • A la fermeture temporaire de tout ou partie de son activité ;
  • A la réduction de l'horaire de travail pratiqué en deçà de la durée légale de travail.

Les motifs de réduction ou de suspension temporairement de l’activité sont les suivants (article R. 5122-1 du Code du travail) :

  1. La conjoncture économique ;
  2. Des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie ;
  3. Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
  4. La transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ;
  5. Toute autre circonstance de caractère exceptionnel (comme l’épidémie de Coronavirus et le confinement).

Pour activer le dispositif d’activité partielle, l’employeur doit consulter le comité social et économique dans les entreprises de cinquante salariés ou plus, en indiquant notamment les motifs de recours, les catégories de salariés concernés, la mise en œuvre et les engagements, notamment en matière de formation. Il faut ensuite formuler une demande d’autorisation à la DDETS, la direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités, en précisant le motif, les circonstances et les modalités. L’entreprise doit attendre l’autorisation de la DDETS pour débuter l’activité partielle, sauf en cas de sinistre, intempéries, ou caractère exceptionnel. Auxquels cas, elle doit effectuer sa demande dans les trente jours suivant le placement en activité partielle.

À combien s’élève l’indemnité de chômage partiel pour un cadre ?

Pour tous les salariés, dont les cadres, chaque heure non travaillée est indemnisée par l’employeur au minimum 60% de la rémunération horaire brute, soit environ 72% de la rémunération horaire nette. L’employeur a le droit d’octroyer une indemnisation plus importante. Dans tous les cas, elle doit être comprise entre 9,12 euros et 31,10 euros par heure chômée. Elle est versée à la date habituelle de paiement du salaire, par l’employeur. Le salarié perçoit, à l’échéance habituelle de la paie, une indemnisation versée par l’entreprise. Seule exception : en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, l’indemnité est versement directement par l'agence de services et de paiement (ASP) sur décision du préfet. Pour les cadres dirigeants, les modalités de calcul de l’indemnité de chômage partiel sont les suivantes (décret du 5 mai 2020) :

* La rémunération mensuelle de référence servant au calcul de l’indemnité et de l’allocation d’activité partielle correspond à la moyenne des rémunérations brutes perçues au cours des douze derniers mois civils ou le cas échéant de la totalité des mois civils travaillés si le salarié a travaillé moins de douze mois, précédant le premier jour de placement en activité partielle de l’entreprise ou de l’établissement.

* Le montant horaire servant au calcul de l’indemnité est déterminé en rapportant le trentième du montant de la rémunération mensuelle de référence obtenue en application de l’alinéa précédent à sept heures.

* Le nombre d’heures non travaillées indemnisables, dans la limite de la durée légale du travail, est obtenu selon les modalités de conversion en heures mentionnées ci-dessus. 

Comment est calculée l'indemnité de chômage partiel pour les cadres au forfait jours ?

Si vous êtes cadre au forfait jours, votre durée de travail est fixée par une convention de forfait en jours sur l'année : vous devez travailler un nombre de jours spécifié par an et non un nombre d’heures définies. Vous êtes rémunéré pour ce nombre de jours effectifs de travail. Or, l'indemnité d'activité partielle est calculée en se basant sur le nombre d'heures travaillées. Alors que se passe-t-il si le salarié est cadre au forfait jours, puisque sa rémunération est calculée sur la base d’un nombre de jours effectifs et non sur la base d’heures travaillées ? Voici les étapes de calcul.

Conversion des jours chômées en heures pour le cadre au forfait jours

Le contrat de travail du salarié bénéficiant d’une convention de forfait annuel en jours indique en principe le nombre de jours travaillés par an. La référence légale maximale pour un salarié soumis à un forfait jours est fixée annuellement à 218 jours

Si le contrat de travail prévoit un forfait annuel inférieur à 218 jours, c’est le nombre de jours fixés au contrat de travail qu’il convient de retenir. L’employeur doit convertir le nombre de jours ouvrés non travaillés par son salarié, en nombre d'heures. Pour ce faire, il peut se baser sur la méthode de calcul suivante :

  • 1 jour non travaillé = 7 heures non travaillées ;
  • 1 demi-journée non travaillée = 3h30 non travaillées ;
  • 1 semaine non travaillée = 35 heures non travaillées.

Calcul du taux horaire de référence de l’indemnité de chômage partiel

Le taux horaire de référence (aussi appelé taux horaire de base) au titre de l’activité partielle est calculé à partir du salaire journalier de base. Le taux horaire est déterminé en divisant la valeur d'une journée entière de travail (rémunération journalière) par 7.

En l’absence de disposition conventionnelle permettant la valorisation d’une journée de travail, la valeur d'une journée entière de travail correspond au montant du salaire mensuel auquel le salarié peut prétendre pour un mois de travail complet divisé par 22 (nombre de jours ouvrés mensuels moyen) pour un forfait de 218 jours annuels.

En cas de forfait prévoyant un nombre de jours inférieur à 218, le dénominateur correspond au nombre moyen mensuel de jours convenu par le contrat de travail. À défaut d’indication, il convient de corriger le nombre moyen mensuel de jours ouvrés (à savoir 22) du rapport entre le nombre de jours prévu par le forfait divisé par 218. Le résultat est arrondi au nombre entier le plus proche.

Calcul du montant de l’indemnité de chômage partiel pour un cadre au forfait jours

Montant de l’indemnité d’activité partielle versée au salarié = 70% du taux horaire brut de référence au titre de l’activité partielle X nombre d’heures éligibles à l’activité partielle. 

Quelles heures chômées sont indemnisées au titre du chômage partiel ?

En principe, sont indemnisées par l’employeur au titre de l’activité partielle les heures chômées en-deçà de la durée légale de 35 heures hebdomadaires, ou, le cas échéant, de la durée collective ou la durée contractuelle. En revanche, les heures supplémentaires non prévues par le contrat de travail ou l'accord collectif ne sont pas indemnisées.

L'indemnisation se fait dans la limite d’un contingent de 1 000 heures par an par salarié, ou cent heures s'il s'agit d'une activité partielle pour travaux de modernisation des installations et des bâtiments de l'entreprise. L'activité partielle peut être mise en place pour une durée de trois mois et renouvelée dans la limite de six mois, consécutifs ou non, sur une période de douze mois consécutifs.

Si le dispositif d’activité consiste en une réduction des horaires de travail, et non une suppression totale, les heures travaillées doivent être rémunérées normalement. Seules les heures chômées seront indemnisées via le dispositif d’activité partielle.

Qui rembourse le chômage partiel à l’employeur ?

L’employeur verse l’allocation d’activité partielle à ses employés. Il est ensuite remboursé par l’Etat, via l’Agence de services et de paiement (ASP). Il doit pour cela, une fois qu’il a obtenu l’autorisation d’activité partielle, formuler une demande d’indemnisation, à effectuer tous les mois sur le site dédié. Cette demande renseigne, pour chaque salarié, les heures hebdomadaires réellement travaillées (ou assimilées, telles que les congés, les arrêts maladie pour motif de coronavirus, etc.) et les heures hebdomadaires réellement chômées. Cette demande doit être faite dans les six mois suivant la fin de la période concernée. Son allocation est de 36% des rémunérations horaires brutes avec, comme montant minimal, 8,21 euros et comme montant maximum 18,66 euros.

Placé en chômage partiel, un cadre au forfait jour peut-il poser un RTT ou un congé payé ?

Oui, un cadre placé en chômage partiel peut parfaitement poser un jour de RTT ou un congé payé pendant cette période. Cette journée d’absence sera convertie en heures (une journée d’absence = 7 heures). Et, ces dernières seront déduites des heures indemnisées au titre du chômage partiel. Sur ces jours pris, le cadre est considéré en congés ou RTT, et non en chômage partiel. Par conséquent, il est payé comme tel. C’est-à-dire qu'il perçoit 100% de sa rémunération et non 70%.

Bon à savoir : il faut appliquer la même règle pour les jours fériés qui tombent pendant l’activité partielle. Ils sont rémunérés à 100%, et non à 60%.

Mathilde Hardy
Mathilde Hardy

Je suis rédactrice web SEO et fondatrice de l’agence Les Nouveaux Mots. J'ai à cœur de rédiger des articles fiables et complets sur les sujets emploi, éducation, immobilier, argent et droit, notamment à destination des lecteurs de Cadremploi, grâce à mon expertise de 10 ans sur ces sujets.

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