
Quelles sont les conditions de validité de la clause de non-concurrence ?
En signant une clause de non-concurrence dans son contrat de travail, le salarié s’engage, lorsqu’il quittera l’entreprise, à ne pas exercer une activité similaire dans une autre entreprise ou pour son propre compte.
Parce que cette clause est contraignante pour le salarié, la Cour de cassation l’a encadrée en imposant plusieurs critères de validité, cumulatifs, repris régulièrement dans ses décisions sous la formulation suivante : une clause de non-concurrence n'est licite « que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives » (par exemple : Cass, ch. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45135).
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La clause est écrite dans le contrat de travail ou la convention collective
La clause de non-concurrence ne peut pas être implicite : elle est toujours écrite. Attention, elle n’est pas forcément intitulée « Clause de non-concurrence » : sa nature résulte de son contenu (Cass, ch. soc., 15 mars 2017, n° 15-28142).
La clause est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise
La clause de non-concurrence doit être motivée par les intérêts de l’entreprise. Dans les faits, elle a souvent pour but d’éviter que la clientèle ne parte avec le salarié.
L’objectif ne doit pas être de freiner le salarié dans sa recherche d’un nouvel emploi. En effet, l’article 1121-1 du Code du travail dispose que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
La clause est limitée dans le temps
L’interdiction doit s’appliquer durant une durée raisonnable, appréciée par rapport à la nature de l’emploi du salarié (souvent 2 ans).
La clause est limitée dans l’espace
La clause de non-concurrence doit indiquer avec précision la zone géographique dans laquelle elle s’applique (département, région...).
La clause est limitée à une activité spécifique
La clause de non-concurrence doit être adaptée au profil du salarié et tenir compte des spécificités de son emploi (contact avec une clientèle dédiée, savoir-faire spécifique, à des procédures propres à l’entreprise, compétences techniques particulières, accès à des informations confidentielles...).
La clause doit prévoir une contrepartie financière
L’employeur doit verser à son employé une indemnité compensatrice, en contrepartie du fait pour le salarié de ne pas lui faire concurrence, et cela quelle que soit la cause de la rupture du contrat de travail (démission, licenciement pour faute grave...)
Son montant ne doit pas être dérisoire (Cass., ch. soc., 15 nov. 2006, n° 04-46271). Il doit être fixé en fonction de la durée et de l'intensité de l'atteinte portée à la liberté professionnelle du salarié. Il peut s’agir d’un montant forfaitaire ou d’un pourcentage de son salaire. Au surplus, ce montant ne peut pas varier selon le mode de rupture du contrat de travail (Cass., ch. soc., 25 janv. 2012, n° 10-11590).
La contrepartie peut être versée sous forme de capital ou de rente. En tous les cas, elle ne doit être versée qu’après la rupture du contrat (Cass., ch. soc., 7 mars 2007, n° 05-45511).
Bon à savoir : la contrepartie doit continuer à être versée même si le salarié retrouve un emploi.
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Comment mettre en œuvre une clause de non-concurrence ?
Parce qu’elle limite la liberté de travail du salarié, la clause de non-concurrence ne doit être insérée dans le contrat de travail que lorsque la nature du poste et la situation concurrentielle l’exigent, pour la bonne santé de l’entreprise.
À quel moment la clause de non-concurrence s’applique-t-elle ?
La clause de non-concurrence concerne l’après-rupture du contrat de travail. Elle s’applique à la fin du contrat de travail : soit à la fin du préavis, soit à la date du départ effectif du salarié en cas de dispense de préavis (Cass., ch. soc., 12 mars 1997, n° 94-43326).
On la distingue donc de l’obligation de loyauté qui s’applique au cours de toute relation de travail entre employeur et salarié, et de la clause d’exclusivité qui interdit toute autre activité professionnelle durant l’exécution du contrat de travail.
Renonciation possible de l’employeur
L’employeur peut renoncer à l’application de la clause de non-concurrence, dans les conditions prévues dans le contrat ou la convention collective, ou à défaut avec l’accord du salarié (Cass., ch. soc., 11 mars 2015, n° 13-22257).
Cette renonciation doit être claire, non-équivoque (Cass., ch. soc., 23 sept. 2008, n° 07-41649), et notifiée au salarié par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception.
La renonciation doit intervenir en cours d’exécution du contrat de travail ou pendant un délai raisonnable fixé dans la clause. Ainsi, une clause qui réserve à l'employeur la faculté de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, est nulle (Cass., ch. soc., 2 déc. 2015, n° 14-19029). En l’absence de délai prévu, la levée de la clause de non-concurrence doit être faite au plus tard au moment du licenciement (Cass., ch. soc., 13 juill. 2010, n° 09-41626).
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Quelles sont les sanctions encourues en cas de non-respect de la clause de non-concurrence ?
Non-respect des critères de validité
Si les critères de validité ne sont pas remplis, la clause est nulle.
Le salarié n’est pas tenu de respecter la clause. Il peut également demander des dommages et intérêts en justice si l’application de la clause lui a porté préjudice.
À noter : seul le salarié peut se prévaloir de cette nullité ; l’employeur reste tenu de verser l’indemnité compensatrice pour la période durant laquelle le salarié a respecté la clause.
Non-respect de la clause de non-concurrence par le salarié
L’employeur cesse le versement de l’indemnité compensatrice, et peut même demander la restitution des sommes déjà versées. Par ailleurs il peut demander des dommages et intérêts s’il démontre en justice l’existence d’un préjudice. Le salarié peut même être contraint par le juge, sous astreinte, à cesser sa nouvelle activité.
Bon à savoir : c’est à l’employeur de prouver le non-respect de la clause de non-concurrence (Cass., ch. soc., 13 mai 2003, n° 01-41646).
Révision par le juge
Si la clause empêche le salarié d’exercer une activité conforme à sa formation et à son expérience professionnelle, le juge peut la réviser dans le temps, l’espace ou ses autres modalités (Cass., 18 sept. 2002, n° 00-42904).
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Diplômée notaire, Josée Pluchet est passionnée de droit privé, du droit civil au droit du travail en passant par le droit de la construction ! Chargée de veille juridique pour plusieurs sociétés, elle suit avec intérêt et attention les évolutions législatives et jurisprudentielles. Rédactrice juridique, elle a à cœur de rendre le droit accessible aux non-juristes. Elle rédige pour Cadremploi des articles relatifs au droit du travail.