J'habite où je veux... ou presque

Sylvia Di Pasquale

Un employeur peut-il obliger un salarié à se domicilier tout près de son lieu de travail lors de l'application d'une clause de mobilité ? La loi répond par la négative mais certaines exceptions restent légales.

 

Si le contrat de travail prévoit une clause de mobilité tout ce qu'il y a de plus légale, le salarié n'a pas le choix : il doit accepter sa mutation et s'en aller travailler là où l'employeur l'a décidé. Ce que l'on sait moins, c'est que cette clause de mobilité n'oblige pas pour autant le salarié à déménager. Explications.

Que dit la loi ?

Selon l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile (...) » Et par là même, au choix de l'endroit où il souhaite s'installer.
Aujourd'hui, il n'est plus nécessaire de s'en aller plaider à Bruxelles en cas de litige, puisqu'une jurisprudence récente* et bien française s'en est mêlée, directement inspirée par l'article européen.
Le 15 mai dernier, la Chambre sociale de la Cour de cassation a définitivement mis fin à une longue procédure qui opposait un salarié à son entreprise. Celui-ci disposait bien d'une clause de mobilité dans son contrat. Son employeur l'oblige, après une première mutation en région parisienne, à travailler en région Paca, en lui intimant l'ordre de se domicilier là-bas. Le salarié refuse et se voit notifier son licenciement. Qu'il conteste jusqu'à obtenir gain de cause devant la Cour de cassation.

Evidemment, dans les faits, une telle mutation s'accompagne presque toujours d'un changement de domicile, même s'il n'est pas explicitement demandé par l'employeur. Pour la simple raison qu'un abonnement quotidien à la SNCF ou à Air France entre Paris et Marseille est d'un coût dissuasif. Et que l'entreprise qui souhaite que son salarié déménage, peut légalement refuser de prendre en charge. Mais le salarié a néanmoins le droit de choisir ou pas de déménager.

Les exceptions

Le code du travail prévoit néanmoins des exceptions. L'article L. 120-2 du Code du travail indique qu'une restriction au libre choix du domicile doit satisfaire deux conditions pour être licite : être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise et être proportionnée, compte tenu de l'emploi occupé et du travail demandé, au but recherché.
En clair, un médecin urgentiste soumis à des astreintes régulières et susceptible d'être dérangé à son domicile ne saurait vivre très loin de son hôpital. Mais des professions plus calmes, comme la maintenance de centrale nucléaire, peuvent également être soumises à des contraintes du même type. Et ne peuvent échapper à un déménagement en cas de mutation.

* Cassation Sociale du 15 mai 2007, R 06-41 277/1070.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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