Licenciement : la mésentente n'est pas suffisante

Sylvia Di Pasquale

Un coup de colère peut être vite effacé. Mais si les protagonistes sont rancuniers, il peut se transformer en conflit tenace entre un employeur et son salarié. Et dégénérer jusqu'au licenciement. "Mésentente" ou "perte de confiance" sont les motifs habituellement mis en avant pour justifier un tel renvoi.

Or de nombreuses décisions de justice sont favorables aux salariés ainsi licenciés et qui, n'acceptant pas leur sort, s'en sont plaint auprès des Prud'hommes. Les juges ont estimé que la mésentente ne saurait justifier un licenciement qu'à la condition où le salarié en est personnellement responsable.

Qui est responsable de la mésentente ?

Il s'agit bel et bien du comportement du salarié lui-même et non de son entourage, comme le démontre l'affaire de cet homme, licencié pour mésentente. Son épouse travaillait à ses côtés dans la même entreprise, jusqu'au jour où elle a démissionné de son poste pour monter sa propre société, concurrente à celle qu'elle venait de quitter. Son mari n'a pas quitté son emploi pour autant et on imagine aisément la dégradation des rapports entre lui et ses employeurs. Ces derniers ont fini par le licencier pour perte de confiance. Mais les juges ont estimé que ce motif n'était pas valable, du fait que le comportement du seul entourage du salarié ne saurait le justifier.
Moins rocambolesque, mais tout aussi significative, cette affaire jugée en cours de cassation et qui donne raison à une caissière-vendeuse contestant son licenciement pour incompatibilité d'humeur. Elle travaillait côte à côte avec la femme de son employeur et leurs rapports se sont dégradés jusqu'au mutisme intégral. Une situation difficile à concevoir dans un commerce. Mais le licenciement a néanmoins été requalifié, car l'employeur n'a pas su démontrer que sa caissière était seule responsable de cette situation.

Licenciement pour mésentente invalidé : une demie victoire

D'autres licenciements ont été invalidés par les Prud'hommes. Mais si les plaignants se voient attribuer des indemnités de départ plus confortables que celles qui leur ont été versées initialement, ils ont néanmoins perdu leur emploi. Car il est vain d'exiger une réintégration dans des cas comme ceux évoqués ci-dessus. Les mésententes n'auront pu que s'aggraver tout au long de la procédure. Reste que, même si l'issue de ce type de conflit n'est finalement qu'une demi-victoire, ces jurisprudences n'en constituent pas moins un frein aux licenciements abusifs.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

Vous aimerez aussi :