
La clause de mobilité est une stipulation courante dans un contrat de travail. Pourtant, son application emporte des conséquences importantes pour le salarié et sa mise en œuvre est souvent source de difficultés, voire de conflits. C’est pourquoi la rédaction de la clause de mobilité nécessite une grande précision, et sa signature une grande vigilance.
Qu'est-ce qu'une clause de mobilité ?
La clause de mobilité est une disposition du contrat de travail qui stipule que le salarié accepte par avance une modification de son lieu de travail à l’initiative de son employeur.
Cette clause peut être insérée dans le contrat de travail au moment de l’embauche, mais aussi dans un avenant ultérieur. Elle peut aussi résulter de la convention collective dont relève le salarié (qui doit alors avoir été portée à sa connaissance).
En l’absence de clause de mobilité, la mutation géographique constitue une modification d’un élément essentiel du contrat de travail, qui nécessite l’accord du salarié et la signature d’un avenant au contrat de travail.
Au contraire, en présence d’une clause de mobilité, la mutation n’est qu’une modification des conditions de travail et s’impose alors au salarié.
À noter : si le changement d’affectation a lieu dans la même zone géographique (ou le même bassin d’emploi), elle constitue une simple modification des conditions de travail, que le salarié ne peut refuser, même en l’absence de clause de mobilité (C. cass., ch. soc., 20 févr. 2019, n° 17-24094).
La loi ne règlemente pas la clause de mobilité ; c’est une jurisprudence abondante qui en a précisé le régime.
Quelles sont les conditions de validité de la clause de mobilité ?
Pour être valable, une clause de mobilité doit respecter certaines conditions.
Une zone géographique précise
La clause doit mentionner avec précision et de façon non équivoque, son champ d’application.
Par exemple, elle ne peut pas s’appliquer aux « zones géographiques où la société exerce son activité » (C. cass., ch. soc., 6 oct. 2010, n° 08-45324), ni autoriser une affectation dans une zone « qui pourra, le cas échéant, être étendue en cas d'extension d'activité » (C. cass., ch. soc., 7 juin 2006, n° 04-45846).
Mais la clause de mobilité peut s’appliquer « dans la limite géographique du territoire français sans possibilité d'extension » (C. cass., ch. soc., 9 juill. 2014, n° 13-11906) ou « dans les établissements situés en France » (C. cass., ch. soc., 14 févr. 2018, n° 16-23.042).
Bon à savoir : le périmètre de la clause est d’autant plus étendu que les compétences et les responsabilités du salarié sont larges.
Pas de modification unilatérale de la clause par l’employeur
Une clause qui permettrait à l’employeur d’étendre unilatéralement le périmètre de la clause de mobilité, sans nouvel accord du salarié, ne serait pas valable.
Il en est ainsi d’une clause autorisant la mobilité « sur l'ensemble du territoire, chaque fois qu'une association est implantée » (C. cass., ch. soc., 14 oct. 2008, n° 06-46400).
Pourtant, dans un arrêt du 9 juillet 2014 (n° 13-11906), la Cour de cassation a validé une clause de mobilité qui permettait à l’employeur de muter son salarié non seulement dans les établissements actuels mais également dans les établissements futurs de la société, à condition que la clause fixe avec précision son champ d’application géographique.
Une mobilité interne à l’entreprise
La clause de mobilité doit se limiter à l’entreprise qui emploie le salarié. Elle ne peut pas concerner d’autres sociétés du groupe (C. cass., ch. soc., 23 sept. 2009, n° 07-44200).
Bon à savoir : la clause de mobilité peut être assortie d’une compensation financière mais il ne s’agit pas d’une condition de validité de la clause.
Mise en œuvre de la clause de mobilité
Le respect d’un délai de prévenance avant la mutation
L’employeur désirant appliquer une clause de mobilité doit en informer le salarié dans un « délai raisonnable ». Cependant, la jurisprudence n’a fixé aucune durée précise, et apprécie ce délai raisonnable au cas par cas.
Un changement d’affectation imposé sans délai raisonnable pourrait être refusé par le salarié sans constituer une faute (C. cass., ch. soc., 22 févr. 2006, n° 04-43167).
Afin d’éviter toute contestation, l’idéal est donc de définir ce délai dans la clause de mobilité elle-même.
Clause de mobilité et refus du salarié
En principe, la clause de mobilité, qui a été signée par le salarié, s’impose à lui. La refuser constitue donc une faute qui peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, voire une faute grave.
Le cas de la clause de mobilité abusive
Dans certains cas cependant, la mise en œuvre de la clause de mobilité peut être abusive. Il en est ainsi notamment :
- lorsque l’employeur ne peut pas justifier d’un motif objectif, dans l’intérêt de l’entreprise, ou lorsque la mutation est disproportionnée par rapport au motif allégué (V. C. cass., ch. soc., 30 mars 2011, n° 09-71542 pour une mutation discriminatoire en raison de l’état de santé du salarié) ;
- lorsque l’application de la clause porte une atteinte majeure à la vie personnelle et familiale du salarié (C. cass., ch. soc., 14 octobre 2008, pourvoi n°07-40523). Ce serait le cas par exemple pour un changement ne permettant plus à une mère de s’occuper de ses enfants en bas âge ;
- lorsque la mutation géographique entraîne des modifications importantes des conditions de travail du salarié. C’est le cas pour un changement de rythme de travail (pour un travail de jour qui se transforme en travail de nuit : C. cass., ch. soc., 14 oct. 2008, n° 07-40092), ou en cas de modification de rémunération ou de perte d’avantages financiers (C. cass., ch. soc., 14 oct. 2008, n°07-41454).
Le salarié peut alors saisir le Conseil de prud’hommes pour faire déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Clause de mobilité et salarié protégé
Il n’est pas possible de mettre en œuvre une clause de mobilité à l’égard d’un salarié protégé (ayant des fonctions représentatives dans l'entreprise). Son accord est nécessaire préalablement à toute mutation géographique (C. cass., ch. soc., 6 mars 2002, n° 99-45244).

Diplômée notaire, Josée Pluchet est passionnée de droit privé, du droit civil au droit du travail en passant par le droit de la construction ! Chargée de veille juridique pour plusieurs sociétés, elle suit avec intérêt et attention les évolutions législatives et jurisprudentielles. Rédactrice juridique, elle a à cœur de rendre le droit accessible aux non-juristes. Elle rédige pour Cadremploi des articles relatifs au droit du travail.