Négociation annuelle obligatoire : ce qu'il faut savoir

Mathilde Palfroy

Vous souhaitez mettre en œuvre des mesures communes pour l’ensemble de vos salariés ? Dès lors que votre entreprise comporte au moins un délégué syndical, vous êtes tenu de mener des négociations annuelles obligatoires avec les représentants de votre personnel. Pour tout savoir sur ces NAO, le point dans notre article.
Négociation annuelle obligatoire : ce qu'il faut savoir

Qu'est-ce que la négociation annuelle obligatoire ?

La négociation annuelle obligatoire (NAO) entre un employeur et les représentants des salariés ont pour objectif de favoriser et d’encadrer le dialogue social au sein des entreprises. Elles sont réglementées par le Code du travail (articles L. 2242-1 à L. 2242-21). S’agissant de dispositions d’ordre public, l’employeur ne peut s’y soustraire. Dans l’idéal, les négociations permettent d’aboutir à un ou plusieurs accords collectifs que les deux parties seront tenues de respecter. Mais ce n’est pas toujours le cas, certains sujets pouvant se révéler plus épineux.

Quelles entreprises sont concernées par la négociation annuelle obligatoire ?

Les entreprises « où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d'organisations représentatives » ont l’obligation d’engager une négociation annuelle obligatoire régulière sur certains sujets relatifs à la vie professionnelle des salariés (C. trav. L. 2242-1). Néanmoins, le site du ministère du Travail ajoute que les NAO s'appliquent dans les entreprises qui comportent au moins un membre de la délégation élue du personnel au CSE, ce qui concerne donc généralement les entreprises d'au moins cinquante salariés, ou celles plus petites si un membre de la délégation élue du personnel au CSE est désigné en qualité de délégué syndical.

Bon à savoir : la nature des sujets à aborder ainsi que la périodicité et les modalités d’organisation des négociations peuvent découler d’une convention collective ou d’un accord de branche. En l’absence d’un tel cadre de références ou d’usages déjà établis au sein de l’établissement, il convient de se référer aux règles minimales posées par le Code du travail.

Important : l’employeur concerné qui n’ouvre pas les NAO et qui refuserait de le faire suite à la demande de ses délégués syndicaux est passible de sanctions pénales.

Quels sont les thèmes obligatoires de la NAO ?

Les dispositions du Code de travail permettent de définir les négociations obligatoires et communes à toutes les entreprises concernées par l'obligation. Le Code du travail (C. trav., L. 2242-1) prévoit que « l’employeur engage au moins une fois tous les quatre ans » :

  • Une négociation portant sur « la rémunération, notamment les salaires effectifs, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l'entreprise » ;
  • Et une négociation sur « l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, portant notamment sur les mesures visant à supprimer les écarts de rémunération, et la qualité de vie au travail ».

En plus de cela, les entreprises de plus de 300 salariés ainsi que les entreprises ou établissements de dimension communautaire de plus de 150 salariés doivent également engager une négociation sur « la gestion des emplois et des parcours professionnels » (C. trav., L. 2242-2).

À noter : le respect d’un accord de branche peut imposer d’autres thèmes de négociation, et l’employeur (comme les délégués syndicaux) peut proposer d’autres sujets de négociation en fonction des besoins de l’entreprise et des salariés. Un accord conclu entre l'employeur et les représentants syndicaux peut prévoir le calendrier, la périodicité, les thèmes et les modalités des NAO, tant qu'il respecte les dispositions légales.

Exemples de sujets de négociations dans le cadre d’une NAO : grilles salariales, modalités de passage à temps partiel ou de mise en place du télétravail, épargne salariale, conditions d’obtention d’une promotion professionnelle, lutte contre la discrimination, prise en charge des frais de transport, etc.

Comment se déroulent les NAO ?

C’est l’employeur (ou son représentant) qui doit mettre en place la négociation annuelle obligatoire, en convoquant les délégués des organisations syndicales représentatives à une première réunion durant laquelle seront précisés le lieu et le calendrier des réunions futures ainsi que les documents à remettre aux participants pour chacun des thèmes prévus à la négociation (C. trav., L. 2242-14). La délégation de chaque syndicat comporte son délégué ou, s'il y en a plusieurs dans l'entreprise, au moins deux. Chaque organisation a la possibilité de compléter sa délégation par des salariés de l'entreprise, dont le nombre est fixé par accord entre l'employeur et les organisations syndicales (à défaut d'accord, le nombre de salariés ne peut dépasser le nombre de délégués, sauf s'il n'y en a qu'un, auquel cas deux salariés sont autorisés).

Pour la suite, l’employeur convoque ses partenaires sociaux pour chacune des réunions prévues, le plus souvent avec une lettre de convocation adressée par lettre recommandée. . Le temps passé en négociation est comptabilisé et rémunéré comme du temps de travail effectif. Chaque section syndicale représentative dispose en plus d'un crédit d'heures pour préparer la négociation.

Important : l’employeur doit veiller à convoquer tous les syndicats ou délégués syndicaux de l’entreprise dès lors qu'ils sont représentatifs.

Quelle est l'issue d'une négociation annuelle obligatoire ?

L’employeur est obligé de mener la négociation annuelle obligatoire, mais le Code du travail n’impose pas la conclusion d’un accord.

Important : durant la négociation et dès lors que celle-ci n’est pas achevée, l’employeur ne peut pas prendre unilatéralement une décision concernant l’un des thèmes objet des NAO, sauf si « la situation d’urgence le justifie » (C. trav., L. 2242-4).

Quelle issue à la négociation annuelle obligatoire après obtention d’un accord ?

Si la négociation peut permettre d’aboutir à un accord, celui-ci doit être rédigé et signé par les deux parties puis être transmis à la la DREETS, la direction régionale de l'économie, des entreprises, du travail et des solidarités, ainsi qu'au greffe du conseil de prud’hommes. Le dépôt auprès de la DREETS doit s'effectuer sur le site prévu à cet effet.

Quand l'apport porte sur les salaires effectifs, il doit être accompagné d’un procès-verbal d’ouverture des négociations au sujet des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. Celui-ci consigne les propositions respectives des parties. Il atteste que l'employeur a engagé sérieusement et loyalement les négociations.

Bon à savoir : l’accord collectif peut être conclu pour une durée maximale de 4 ans, puisque les questions devront de nouveau être négociées à cette échéance. Il peut sinon prévoir à quelle date une nouvelle négociation aura lieu, en deçà de ce délai.

Quelle issue à la négociation annuelle obligatoire lorsque aucun accord n’est trouvé ?

Si les négociations annuelles obligatoires ne permettent pas d’aboutir à un accord, alors l’employeur doit rédiger un procès-verbal détaillant les discussions ayant eu lieu et les arguments ou propositions des parties présentes ou représentées. . Il indique aussi les mesures qu'il entend appliquer unilatéralement. Ce procès-verbal doit lui aussi être transmis à la DREETS et au conseil de prud’hommes.

En cas d'absence d'accord sur l'égalité entre les femmes et les hommes, la prochaine négociation sur les salaires doit prévoir des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre femmes et hommes. Si aucun accord sur le sujet n'est trouvé, l'employeur doit établir un plan d’action annuel pour assurer l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.

S'il n'y a pas d'accord à la suite d'une NAO, les négociations concernant la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée doivent reprendre avec une périodicité annuelle, en incluant l'objectif d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (C. trav., L. 2241-8)). Il en va de même pour les négociations portant sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ainsi que la qualité de vie et des conditions de travail (incluant, pour les entreprises dont au moins cinquante salariés sont présents sur site, une négociation sur la mobilité entre le lieu de résidence et de travail).

Mathilde Palfroy
Mathilde Palfroy

Éditrice et rédactrice juridique, Mathilde Palfroy s’intéresse à tous les sujets pratiques du quotidien. Elle rédige pour Cadremploi des articles sur des thématiques liées à l’emploi et à la carrière. En plus de ses collaborations avec différents éditeurs spécialisés, elle assure également le suivi d’ouvrages de littérature générale aux éditions de la Rémanence dont elle est la fondatrice.

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