« Au niveau des salaires, c'est la fin des propositions spectaculaires »

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Erwan Poiraud, directeur de l'ICD International Business School et sociologue du travail, revient sur la hausse du chômage et les effets de la crise sur le marché de l'emploi.

Après une embellie printanière, la courbe du chômage repart à la hausse depuis mai dernier. Alors, crise ou pas crise ?

D'abord, contrairement à ce que l'on a pu lire ici ou là, ce regain du chômage n'est pas une surprise. L'emploi est corrélé à la croissance. Or, au printemps, nous avons connu un moment de respiration après une période de contraction. Ceux qui ont voulu y voir un début de sortie de crise se sont lourdement trompés. Les perspectives de croissance ne sont pas bonnes et le chômage devrait continuer sa progression.

Pourtant, les offres d'emplois sont bel et bien au rendez-vous, comme nous l'observons sur les jobboards. N'y a-t-il pas là une raison de se réjouir ?

Si, si l'on entend par là que les entreprises françaises continuent de créer de l'emploi. Elles le font, c'est vrai : sur les six derniers mois, elles ont créé autant d'emplois que sur toute l'année 2010, soit près de 120 000. Le problème est que cela ne compense pas l'accroissement de la population active. Nous avons 100 000 étudiants de plus chaque année depuis 3 ans (heureusement, ce phénomène prendra fin l'an prochain). En outre, avec l'allongement de la durée de cotisation retraite, les séniors sont plus nombreux sur le marché. Sur ce dernier point, on peut déplorer que la France emploie moitié moins de séniors que les pays nordiques, l'Allemagne ou le Japon. Nous devons suivre leur exemple et développer le mentoring - l'accompagnement des jeunes par les salariés séniors dans l'entreprise -.

En attendant la croissance providentielle, où s'insèrent vos jeunes diplômés ?

Ce qui protège, c'est l'expérience et le diplôme. D'où la situation de quasi plein emploi des cadres. Les diplômés des grandes écoles françaises restent relativement préservés mais ils mettent deux fois plus de temps à décrocher leur premier poste - soit 7 mois en moyenne - qu'avant la crise. Concernant leurs débouchés, il s'agit moins d'une distinction par secteur que d'une distinction par fonction. La fonction commerciale recrute le gros de nos diplômés, car les entreprises veulent reconquérir des parts de marché. Les secteurs de la banque-assurance [voir notre dossier, NDLR], de la distribution (postes d'encadrement, de chefs de rayons...) sont en première ligne.

Le e-business continue sa percée, avec de nouvelles fonctions comme le community management ou le yield management. Enfin, on assiste au grand retour des ingénieurs (nombreux dans la téléphonie, l'aéronautique...) car la R&D, c'est la valeur ajoutée des entreprises. Ce sont les fonctions de back-office (marketing, RH...) qui souffrent le plus, car c'est là que les entreprises limitent leurs coûts. Enfin, les jeunes diplômés bac+5 et plus bénéficient de plus en plus de l'alternance (organisée en fin de cursus).

Enfin, au niveau des salaires proposés, la part de variable est de plus en plus importante. Finies en outre les propositions spectaculaires, comme cela était le cas il y a deux trois ans, par exemple en banque/finance. Les salaires sont, et de plus en plus, adossés aux résultats.

Propos recueillis par Marine Relinger @ Cadremploi.fr

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