Conjoncture : la vérité sur les salaires des cadres

Marine Relinger

Le point sur les derniers rebondissements du marché du recrutement des cadres avec Antoine Morgaut, le patron pour la zone euro du cabinet britannique de chasseurs de têtes Robert Walters.

Hausse des primes à la mobilité, fixe révisable quelques petits mois après l'entrée en poste, avantages en nature, welcome bonus... Cet arsenal, L'Expansion en faisait une liste optimiste il y a quelques jours encore. Les cadres, douchés par la crise, bougent de nouveau ! Les salaires augmentent (étude Reed) et augmenteront en 2012 ! Bref, les cadres ont confiance et veulent rattraper le temps perdu ! « Du moins en était-il ainsi jusqu'à cet été », concluait prudemment l'auteur de ces lignes.

Renversement de tendance

« En deux semaines, tout a changé, et c'est la première fois de ma vie que j'assiste à un tel renversement de tendance », assure Antoine Morgaut, CEO Europe et Amérique du Sud chez Robert Walters. Crise des dettes souveraines en Europe et aux Etats-Unis, réactions épileptiques des marchés, politiques de rigueur, croissance en berne, chômage en hausse... Les indicateurs sont au rouge.

« Les entreprises se retrouvent soudainement dans l'expectative. Le mot d'ordre en termes de recrutement depuis deux semaines, c'est de reporter sa décision», rapporte ce dernier. Plus personnes, pas même les cadres, n'entendraient prendre de risque.

Moral des cadres en berne

Le baromètre du moral des cadres publié cette semaine par le Figaro confirme l'analyse : il a chuté de 30 points depuis le mois de mai. « Du jamais vu. Et à -55, l'indice est tombé à son plus bas niveau depuis sa création en 2004 », a souligné dans la presse François Miquet-Marty, président de Viavoice, son concepteur.

Que faut-il en conclure? « Pas grand-chose, tempère Antoine Morgaut. Personne n'est capable de se projeter, d'où l'immobilisme qui prévaut soudain... et je ne nous vois pas sortir de cette période d'incertitude avant octobre ».

Deux scénarios ?

Structurellement, la relance du marché est là : les entreprises - « qui ne vont pas si mal ! », comme le signale dans son édito du jour Dominique Seux, des Echos - ont besoin de recruter et font face à une pénurie des talents. « Après le gel des recrutements ces deux dernières années, elles n'ont plus beaucoup de marge pour réduire leurs effectifs. S'il faut mettre 10 ou 15% de plus pour garder ou faire venir un expert, on le fait », résume Antoine Morgaut. Si la crise est de courte durée, on repartira sur cette lancée.

Par contre, si la crise se prolonge, les entreprises vont très probablement geler embauches et salaires, en premier lieu dans le secteur exposé de la banque-finance. « La hausse des écarts de rémunérations au sein de la population cadres devrait alors s'amplifier », ajoute le recruteur qui estime qu'« on en saura plus dans un mois ».

Marine Relinger
Marine Relinger

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