Bac+2 : un « bel avenir » à bas salaire

Antoine Vlastuin

On le sait, les DRH aiment les formations courtes. Une récente étude confirme l'idylle mais fait aussi apparaître des frustrations de la part des diplômés comme des recruteurs. En poste mais avec des compétences à approfondir, les recruteurs leur proposent un salaire d'embauche trop faible pour décourager les poursuites d'études.

Des postes par milliers


Les filières courtes ont bonne presse auprès des diplômés qui, à 77 %, se déclarent satisfaits de leurs études, selon la récente enquête menée par l'Ifop pour le compte du cabinet Page Personnel intitulée « Performances et profils de carrières des diplômés des filières courtes ». Un satisfecit que Frédéric Michau, qui a dirigé l'étude pour l'Ifop, qualifie plutôt d'« intensité modérée ». Effectivement, près d'un quart (23 %) des sondés regrettent leur choix.
Frustrés mais pas coulés, les diplômés des BTS, DUT et autre licences professionnelle se félicitent cependant de la capacité de leurs formations à assurer une intégration rapide dans la vie active. De fait, 93 % des titulaires de bac+2 ou +3 travaillent. Logique, la quasi-totalité des entreprises sondées emploient des diplômés des filières courtes (94%).  


Les limites des formations courtes


Bizarrerie de l'enquête, si les DRH plébiscitent  les bac+2/+3, ils sont les premiers à pointer les failles de ces formations. Ainsi, moins d'un employeur sur deux déclare que le titulaire d'un diplômé d'une filière courte a de bonnes connaissances techniques et qu'il est rapidement opérationnel (48 %). Seulement un tiers des diplômés des filières courtes s'adapterait rapidement aux évolutions de leurs métiers. « C'est paradoxal », s'étonne Patrice Hamon, chef de département au sein de l'IUT du Havre. « Tous les échos que nous avons des entreprises sur nos anciens étudiants sont positifs voire très positifs. L'unique réserve vient effectivement des compétences techniques : un bac +2 a les compétences d'un bac+2. En revanche, le management s'acquièrent plutôt à bac+4 ».


Des salaires qui restent bas


Les chiffres ne trompent pas. Si 82 % des entreprises apprécient les diplômés des filières courtes, c'est qu'ils pèsent peu dans leur masse salariale. L'étude confirme que 30 % des diplômés des filières courtes gagnent moins de 20 000 € brut par an. Le pourcentage monte à 46 % pour les diplômés de moins de 30 ans. Des rémunérations faibles qui touchent deux fois plus les femmes (38 %) que les hommes (19 %).  Mais, si l'on en croit Sébastien Hampartzoumian, directeur général de Page Personnel « les diplômés des filières courtes ont une capacité à rattraper leur retard [en terme de salaire] » Argument relayé par Isabelle Bastide, elle aussi directrice pour  Page Personnel « il m'arrive fréquemment de recruter à des salaires de 35K€ par an ».


Un bac+2 ou +3, et puis c'est tout ?


Lot de consolation, les bac+2 et bac+3 ont l'avenir devant eux. « Plus le marché va se contracter et plus les entreprise vont s'intéresser à ces profils. C'est déjà le cas dans la banque notamment et dans les filières techniques.  Les mentalités changent, l'effet de levier est  de plus en plus marqué », explique Sébastien Hampartzoumian.
A la délicate question des velléités  de poursuites d'études, l'enquête ne répond pas. Selon Fréderic Michau de l'Ifop, «  il n'y pas d'indicateur précis sur le souhait des diplômés des filières courtes à  poursuivre leurs études ». « Faux, »  rétorque  Patrice Hamon. «Les nouveaux diplômés poursuivent leurs études et la tendance est à la hausse.  Pour certaines filières, c'est même du 100 %. » La raison ? «  Une  pression sociale et une rémunération plus avantageuse après un diplôme supplémentaire. Beaucoup d'étudiants continuent, même si de leurs propres aveux, ils apprennent parfois  peu de choses supplémentaires.»

Selon l'Apec, le salaire médian des jeunes diplômés à Bac +4 et plus est de 27 300 € par an alors que le salaire médian toutes catégories d'âge confondues pour les bac+2 et +3 est  inferieur à 25 000 €. Quelques milliers d'euros qui peuvent faire toute la différence.

Antoine Vlastuin
Antoine Vlastuin

Vous aimerez aussi :