Le digital est en train de bouleverser le marché de l’emploi en France et dans le reste du monde. Arnaud Cantet, directeur associé du cabinet de recrutement Lincoln Associates, confirme : en 2014, il a observé une hausse de 60 % de la demande des entreprises dans le secteur du digital.
Et la tendance ne devrait pas s’inverser de sitôt : d’après une étude TNS Sofrès pour Abilways, 70 % des salariés estiment que la transformation digitale est en cours dans leur secteur d’activité (pour 14 % d’entre eux, elle a déjà eu lieu). « Le digital n’est plus un épiphénomène, c’est une industrie avec une croissance à deux chiffres, dont le chiffre d’affaires pèse autant que le secteur automobile en France ! » rappelle Jacques Froissant, PDG d’Altaïde, spécialiste du recrutement dans le digital.
Un marché en tension mais des entreprises ultra-exigeantes
En 2007, on estime à 700 000 le nombre d’emplois non pourvus dans le secteur en Europe. Le digital, nouvel Eldorado du marché du travail ? Attention à ne pas aller trop vite en besogne ! Parce que le digital navigue en plein paradoxe : « malgré la pénurie de candidat, il n’est pas pour autant facile de trouver un emploi dans le digital », explique Perrine Grua, directrice générale France et Pays-Bas chez Aquent, une agence de recrutement spécialisée dans le marketing et la communication. Et pour cause : « les entreprises recherchent des profils extrêmement pointus… sur des compétences qui viennent à peine d’apparaître ! ». La spécialiste du recrutement estime qu’aujourd’hui, 70 % des demandes de ses clients correspondent à seulement 3 % des métiers recherchés en 2011 ! ».
Le déficit de profils compétents pose évidemment la question de la formation. « Aller chasser les compétences rares chez le concurrent ne fonctionne plus toujours, affirme Perrine Grua. Les entreprises sont obligées de repenser leur politique RH en terme de parcours et de formation ». En clair : recruter à l’extérieur coûte cher. Les entreprises commencent à comprendre qu’elles ont tout intérêt à développer les compétences de leurs salariés en interne.
Des compétences pointues à développer
C’est dans le marketing et la communication que la transformation est la plus avancée. Un baromètre sur les métiers et les compétences de la transition digitale réalisé par Interactive Advertising Bureau (IAB) s’est penchée sur les spécificités du marketing digital et les compétences que les professionnels vont devoir développer pour évoluer dans ce secteur. Il a ainsi dégagé cinq domaines de compétences clés pour les professionnels du marketing et de la communication digitale.
- Les compétences analytiques : « la donnée (data) est en train de devenir omniprésente dans le marketing digital. Les professionnels du secteur doivent être capables de la produire et de l’analyse », analyse Perrine Grua.
- Les compétences techniques : qu’il s’agisse de code, de graphisme ou encore de SEO/SEM (référencement), les marketeurs doivent être capables désormais de maîtriser une série d’outils techniques qui varient selon leur secteur d’activité.
- Les compétences "interface consommateur" :l’expérience utilisateur est au cœur de la démarche marketing digital. « Les pros du marketing travaillent de plus en plus sur la personnalisation et l’étude fine des comportements individuels, rappelle Perrine Grua. À l’inverse du marketing "traditionnel", plutôt basé sur l’étude des groupes.
- Les compétences créatives : la personnalisation des démarches marketing implique une plus grande diversité en termes de contenus, de graphisme ou de dispositif.
- Les compétences en management et en organisation : l’étude IAB révèle que la gestion de projet est considérée comme une dimension essentielle à développer pour les marketeurs (78 % des sondés).
Pour tirer son épingle du jeu dans ce secteur en pleine expansion, les professionnels du marketing ont donc tout intérêt à s’assurer que leurs compétences sont à jour. Pour ceux qui ont déjà pris le train du digital en route, pas de grands travaux à prévoir : sur les compétences techniques, les formations courtes et l’auto-formation (MOOCs, séminaires, webinars, etc.) sont plébiscités. « Il faut s’inspirer des développeurs freelance, qui ont, depuis longtemps déjà, pris l’habitude de se former à de nouveaux langages durant leur période de creux », recommande Perrine Grua.
Des formations longues pour "basculer" dans le digital
Mais si le digital vous est encore inconnu, il faut envisager un cursus plus long. « En quelques jours, on peut s’initier à certaines thématiques comme "découvrir les réseaux sociaux" ou "travailler son image sur internet", précise Franck Papazian, président de Media School Group, mais on ne se forme pas au digital en quatre jours ». Pour réussir son « plongeon dans le digital », Perrine Grua recommande elle aussi les programmes longs, de type Executive Master, Mastère Spécialisé ou MBA spécialisés.
L’offre de formation continue longue dans le digital ne cesse de se développer. Media School Group va ainsi lancer deux Executive Masters (Data et Communication et Marketing) à l’automne 2015. « Ces formations s’adressent à des cadres qui sont déjà dans l’univers du marketing et de la communication, mais qui ont besoin de basculer dans le digital », précise Franck Papazian.
Sciences Po Paris vient également d’annoncer le lancement d’un Executive Master Digital Humanities, dont l’objectif est de permettre aux professionnels de penser leur stratégie organisationnelle, leur modèle d’affaires et leurs pratiques dans un environnement digital.
Du côté de l’offre déjà existante, trois formations se distinguent par leur approche ouvertement tournée vers le digital :
- Le MBA MCI (Marketing Commerce sur Internet) de l’Institut Léonard de Vinci à Paris ;
- L’Executive MBA E-Business de l’ESG, également à Paris ;
- Le Mastère Spécialisé Études et Décisions Marketing de Neoma Business School.
Néanmoins, la majorité des Executive Masters et des Mastères Spécialisés tournés vers le marketing et la communication abordent la dimension digitale. Il ne faut pas hésiter à se pencher sur le détail des programmes et à contacter les écoles pour obtenir des renseignements précis sur leurs cursus Executive.
